Né le 2 juin 1893, Clotaire PETIT a passé son enfance dans la Rue du Moulin, à Régnière-Ecluse, dans le Ponthieu. On l’appelle rue, mais c’est en réalité une impasse, puisqu’on ne peut pas aller bien loin. A peine descendu quelques dizaines de mètres, on a les pieds dans l’eau. Il n’y a que 4 maisons dans la Rue du Moulin, et, tout en bas, coule la Maye, l’un des plus petits fleuves côtiers de la Somme (37 km). Comme tous les enfants, Clotaire aime jouer dans l’eau et regarder tourner la roue à aube du moulin, situé au bout de la petite rue où habite la famille de Clotaire.
Le vieux moulin à eau n’est plus utilisé que pour les besoins de la commune en farine, et pour faire des moutures pour la nourriture ou l’engraissement du bétail.

Les parents de Clotaire s’appellent Henri et Hélèna. Les PETIT habitent Régnière-Ecluse depuis plusieurs générations. Hélèna HERVET vient de la commune voisine de Vron.
L’impasse donne sur la grande rue qui mène de Crécy-en-Ponthieu à Rue, et qui passe au pied du château du Comte d’HINNISDAL.
Avant d’entrer dans l’impasse, se trouve l’église entourée du cimetière, à gauche, puis la première maison, c’est le presbytère. Le curé, l’abbé DEMOLLIENS, y réside avec sa bonne, Adelaïde. Ensuite, il y a une maison souvent inhabitée qui appartient au Comte, puis la maison de Clotaire et celle d’Henry, son copain. Clotaire et Henry ont le même âge.
Le 3e membre de la bande, c’est Ildevert. Il habite dans la Rue de Crécy, pas très loin de l’église. Lui n’est pas né à Régnière-Ecluse, mais il s’est tout de suite fait accepter. Il s’appelle Ildevert ASTARICK.
Dans les familles PETIT, CAUDRON et ASTARICK, les pères sont ouvriers agricoles. Les fermes sont nombreuses dans la commune. Et quand ils ne travaillent pas pour les agriculteurs, ils travaillent au château. Une importante main d’œuvre est nécessaire pour entretenir un parc aussi immense.

Clotaire PETIT a une soeur, prénommée Berthe et trois frères. Antony est né en 1886, Gabriel et 1899 et Sosthène en 1900.
Dès qu’ils peuvent quitter les bancs de l’école de Monsieur CAUMARTIN, les enfants, chez les PETIT, chez les CAUDRON, ou chez les ASTARICK, travaillent, comme leurs pères, dans les fermes de Régnière-Ecluse. Antony, le frère aîné de Clotaire, se fait embaucher par Vulma et Léocadie BARBIER, de l’autre côté de la rue de Crécy. Vulma est agriculteur pendant que Léocadie tient le débit de boisson.
Puis vient l’heure du service militaire. C’est au chef-lieu de canton, à Rue, que Clotaire, Henry et Ildevert se présentent pour passer devant le Conseil de Révision. Clotaire est affecté au 72e Régiment d’Infanterie d’Amiens.

Nombreux sont ceux qui prennent le train, les 26, 27 et 28 novembre 1913, pour rejoindre leur lieu d’incorporation. La loi Barthou, en ajoutant une année supplémentaire à la durée de 2 ans du service militaire, provoque le départ de tous ceux qui viennent d’avoir 20 ans. Avant la loi, il fallait avoir 20 ans révolus. Les trois compères partent prendre le train à la gare de Rue, en direction de Paris. Clotaire descend à Amiens. Henry, affecté au 29e Régiment d’Artillerie, va dans l’Aisne, et Ildevert doit aller beaucoup plus loin puisque le 120e Régiment d’Infanterie où il a été incorporé, a quitté Péronne pour caserner à Stenay, dans la Meuse.
Début août 1914, c’est la déclaration de guerre entre l’Allemagne et la France. Le 72e RI part dans le Nord-Est de la France, dans le département de la Meuse. Alors qu’il est relativement épargné par les premiers combats du 22 août, en Belgique, le régiment connaît ensuite de nombreux champs de bataille meurtriers, notamment pendant la Bataille de la Marne, début septembre. Clotaire est blessé au bras droit par un éclat d’obus à Maurupt-le-Montois, dans la Marne. Evacué pour être soigné à l’arrière, il revient un mois plus tard. Le régiment combat maintenant en Argonne, puis dans la Meuse. Clotaire est évacué pour maladie gastrique en novembre. Après une période de convalescence, c’est une nouvelle hospitalisation, pour entérite. L’état de santé de Clotaire est mauvais. A peine soigné d’une maladie, une autre arrive. Passé au 128e RI en mai 1915, il est à nouveau évacué pour maladie en juillet. A son retour, c’est un nouveau changement d’affectation. C’est au 64e RI qu’il continue la guerre.

Clotaire PETIT est porté disparu par l’Etat-major du régiment, le 13 février 1916, à Sainte-Marie-à-Py (Marne), il est possible de craindre le pire. L’Armée française est informée quelques semaines plus tard, par l’intermédiaire de la Croix-Rouge, qu’il est toujours vivant. Après être passé par Sedan, il est retenu en captivité à Wahn, en Rhénanie, au Sud-Est de Cologne. Il n’est rapatrié que le 12 décembre 1918, un mois après la signature de l’Armistice. L’Armée lui accorde alors généreusement une permission d’un mois… avant de le renvoyer sous les drapeaux. Clotaire PETIT est finalement mis à la disposition des Chemins de Fer du Nord, en gare du Tréport.
Henry CAUDRON a fait toute la guerre dans l’Artillerie. Evacué plusieurs fois pour maladie, il est revenu indemne.
Ildevert ASTARICK a été blessé dès le début de la guerre, à Bellefontaine, en Belgique. Le 22 août, c’est une balle au niveau de l’aisselle gauche. Puis le 19 octobre, il est blessé au cou, à l’épaule et au pouce par balles explosives. Après un longue convalescence, il rejoint finalement l’Armée d’Orient, puis le 4e Régiment de Zouaves le 26 juin 1916.
Les trois copains ont été démobilisés à l’été 1919. Mais seul Ildevert a poursuivi sa vie à Régnière-Ecluse.
Clotaire PETIT, est resté aux Chemins de Fer du Nord, après la démobilisation. Il a ensuite suivi son travail. Il est venu épouser Georgine à Régnière-Ecluse, puis, tous les deux, sont partis vers l’Aisne et la cité cheminote de Tergnier.

Henry CAUDRON s’est marié six ans plus tard, avec Maria, à la mairie de Vaugirard, à Paris. Leur vie les a emmenés bien loin du Ponthieu.
Quant à Ildevert ASTARICK, il a abandonné l’agriculture, pour devenir épicier-débitant, avec son épouse Georgette. Un café sur la grande route qui relie Crécy à Boulogne-sur-Mer, en passant par Rue, à quelques dizaines de mètres de l’église et de la Rue du Moulin.
Les 4 garçons de la fratrie PETIT ont survécu à la guerre. Antony, l’aîné, de santé fragile n’a pas été envoyé combattre. Il a été maintenu dans son emploi au Chemin de Fer au service de l’Armée française. Gabriel et Sosthène, trop jeunes pour être mobilisés, ne sont pas partis. Si la guerre avait duré 2 années de plus, leur sort n’aurait assurément pas été le même. Seul Clotaire a connu l’enfer des combats. Mais il en est revenu.
Si les fils d’Henri et Héléna ont survécu à la guerre, le patronyme de PETIT figure toutefois sur le monument aux morts de Régnière-Ecluse. Albert PETIT, leur cousin, n’est jamais revenu de la guerre. Il a 23 ans pour toujours.
Clotaire PETIT est mort près de Tergnier, en 1965 ; Ildevert ASTARICK à Régnière-Ecluse, en 1977 et Henry CAUDRON, à Bayonne, en 1980
Il n’y a plus aujourd’hui de moulin à eau, à Régnière-Ecluse.
Lionel JOLY et Xavier BECQUET
« De la Somme à Bellefontaine – 22 août 1914 » – recherche collaborative 1891, 1892, 1893 – Département Somme. Jean-Claude MAISON a réalisé la collecte de données pour la commune de Régnière-Ecluse.
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