ILS AVAIENT 20 ANS EN 1914 – Jules dit Richard GORGUET de Villers-Faucon

Né le 14 novembre 1890, Richard GORGUET est le fils de Gustave GORGUET et de Maria CAMUS.

Les GORGUET et les CAMUS résident dans le hameau de Leuilly situé sur le territoire de la commune de Villers-Faucon. Ce hameau était une commune à part entière jusqu’à la Révolution française.

Emile VION est fabricant de sucre. Victor, son fils, est propriétaire de la ferme de Leuilly. Une grande sucrerie-distillerie est alors implantée sur leurs terres.  L’exploitation agricole et la fabrique donnent alors du travail à de nombreux habitants de Villers-Faucon et des villages des alentours, dont certains viennent même s’installer à Leuilly. Le hameau change de nom devenant Sainte-Emilie, prénom que portait l’une des filles de Victor, née en 1880.

C’est donc à Sainte-Emilie que Richard GORGUET voit le jour, à la fin du XIXe siècle. 

Gustave GORGUET et son frère Alphonse deviennent journaliers chez Monsieur VION. Les fils GORGUET épousent les filles CAMUS. Gustave se marie avec Maria et Alphonse avec Aimée.

Gustave s’installe Rue des Quitteaux et Alphonse, Rue Denise. Maria et Aimée portent leur première grossesse presque en même temps. Jules GORGUET est le premier à naître dans le foyer de Gustave et Maria, suivi deux mois plus tard par son cousin Ernest chez Alphonse et Aimée.

Les trois premiers enfants de chacune des fratries sont des garçons. Six cousins germains GORGUET habitant tous à Sainte-Emilie, hameau de Villers-Faucon. Un hameau où la betterave sucrière est reine. Les garçons savent qu’après avoir quitté les bancs de l’école, ils trouveront sans problème du travail.

Hélas, l’avenir n’est pas toujours celui qui semble tracé. Ernest, Louis et Gaston, les trois frères de la Rue Denise perdent successivement leurs deux parents. L’avenir s’écrira loin de Villers-Faucon maintenant pour les cousins GORGUET, pris en charge par l’Assistance Publique de la Somme.

Richard GORGUET a deux frères, Cyrille et Alphonse, et une petite sœur née en 1906 prénommée Fernande. Adolescent, Richard devient bouvier. Les trois frères sont employés dans la ferme de Victor VION. 

Richard est le premier à partir pour le service militaire. Il est incorporé au 51e Régiment d’Infanterie de Beauvais le 9 octobre 1912, puis est muté au 18e Bataillon de Chasseurs à Pied le 25 novembre 1913. Quand la guerre est déclarée, début août 1914, le 18e BCP, d’abord caserné à Stenay puis à Longuyon dans la Meuse, est prêt au combat. Les Chasseurs du Bataillon sont à cheval, à pied ou à bicyclette. Dans les premiers jours du mois d’août, leurs missions consistent à s’approcher de la frontière, voire la franchir, pour tenter de localiser les troupes ennemies qui ont envahi, dès le 4 août, les territoires du Grand-Duché du Luxembourg et de la Belgique.

Le 22 août 1914, le 18e BCP apporte son soutien au 120e Régiment d’Infanterie qui lance une offensive contre les Allemands sur le territoire du village de Bellefontaine en Belgique. Le 120e RI est décimé. Plus de 1 000 hommes sont mis hors combat. Au 18e BCP, on compte également plusieurs victimes. Richard GORGUET est mort. Il avait 23 ans. Considéré comme disparu après la bataille puis déclaré mort, son corps ne sera finalement jamais identifié.

Les frères cadets ne partiront jamais combattre pendant la guerre. Les populations civiles du canton de Roisel et de tous les villages situés à l’Est du front sont prisonnières de l’occupant allemand. Les hommes sont rapidement transférés vers la Belgique ou vers le Nord de la France. Les frères GORGUET, comme la plupart des habitants de la commune de Villers-Faucon, sont déplacés vers la ville de Denain, dans le Nord.

En Février 1917, les derniers habitants de Villers-Faucon, essentiellement des femmes et des enfants, sont évacués du village par les Allemands et transférés à Denain. Des charges de dynamite sont posées autour des édifices de la commune, y compris la sucrerie de Monsieur VION à Sainte-Emilie, les arbres sont coupés et toutes les habitations sont détruites. Le village est anéanti. Les ruines du village encore occupé par les Allemands sont plusieurs fois reprises par les deux camps en présence. Le village n’est libéré qu’en septembre 1918 par les Britanniques.

Prisonniers des Allemands pendant quatre années, Cyrille et Alphonse GORGUET ne sont mobilisés par l’Armée française qu’en 1919, après le départ de l’occupant et la signature de l’Armistice. Ils ont échappé aux combats et n’ont pas échappé à la perte d’un être cher. Leur frère aîné, Richard, ne reviendra jamais.

Chez les cousins GORGUET, la guerre a également tué. Gaston GORGUET, le plus jeune des trois frères, est mort le 28 avril 1917 dans la Marne. Il avait à peine 20 ans. Louis, le 2e frère, s’était engagé en 1911. Il a combattu pendant la guerre avec le 1er Régiment de Tirailleurs Marocains puis est passé au 1er Groupe d’aviation. Terminant le conflit avec le grade de sergent, il a été démobilisé en août 1919 sans avoir trop de séquelles physiques.

La guerre du frère aîné des cousins, Ernest, a été beaucoup plus mouvementée. Engagé volontaire comme son frère, il a été affecté au 72e Régiment d’Infanterie d’Amiens à la déclaration de guerre. Progressant rapidement dans la hiérarchie militaire, il est adjudant quand il subit sa première blessure. Dans la Meuse, en avril 1915, Il est blessé au genou par éclat d’obus. En 1917, il est chargé d’assurer l’instruction des nouveaux mobilisés de la Classe 1918, puis il repart au front. En février 1918 il est blessé au bras gauche par éclat d’obus puis en octobre 1918, il est gazé à Marvaux dans les Ardennes. Promu sous-lieutenant, il est démobilisé en mars 1919. Il compte plusieurs citations mettant en avant son courage et sa bravoure. Ses états de service, ses blessures et les citations à l’ordre du régiment, lui valent d’être promu Chevalier de la légion d’honneur en juin 1920.

Mais le retour à la vie civile d’un jeune et brillant officier au sortir de la guerre n’est pas toujours un long fleuve tranquille. Ernest GORGUET est condamné à plusieurs reprises par la justice. Sa Légion d’honneur lui est retirée en 1928.

Le nom de Jules dit Richard GORGUET est inscrit sur le monument aux morts de Villers-Faucon. Celui de son cousin germain Gaston GORGUET figure sur le grand monument d’Amiens, la commune où il a été recueilli par l’Assistance Publique après le décès de ses parents.

La grande sucrerie de Monsieur VION a été totalement détruite pendant la guerre. Un projet de reconstruction sur le site de Sainte-Emilie a été lancé à la fin de l’année 1921 par la Vermandoise de Sucreries, société formée à partir des anciennes sucreries du secteur. Dès sa remise en service, la capacité de traitement de la sucrerie était équivalente à celle d’avant-guerre. La sucrerie de Sainte-Emilie reste une des six dernières sucreries de betteraves encore en  activité dans la région picarde.

Comme de nombreux habitants de la commune, Cyrille et Alphonse GORGUET, les frères rescapés de Richard, ne sont pas revenus vivre à Villers-Faucon après la guerre. Ils ont choisi de rester à Denain, ville où ils ont vécu la guerre, loin des champs de bataille. 

Lionel JOLY et Xavier BECQUET

« De la Somme à Bellefontaine – 22 août 1914 » – recherche collaborative 1891, 1892, 1893 – Département Somme.  Didier BOURRY a réalisé la collecte de données pour la commune de Villers-Faucon.

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