Victimes de la Première Guerre mondiale – une Somme de vies brisées par 14 18.
Né le 27 janvier 1891, Jules HOUBART est le fils d’Abel et de Philomène.
Abel est originaire de Beauval près de Doullens et Philomène de Saint-Sauflieu près d’Ailly-sur-Noye.
Le couple se marie en 1875 à Saint-Sauflieu. Ernestine, leur premier enfant, naît en 1876 alors que Philomène n’a que 19 ans, suivie par Pierre-François et Alcide. Après la naissance de leur troisième enfant, le couple quitte Saint-Sauflieu pour venir à Amiens, avant finalement, de s’installer dans la commune voisine de Camon. Albert, Blanche et Jules naissent dans la maison familiale située sur la Place du village.

Dans la fratrie les différences d’âge sont importantes. Quand Jules est en âge d’aller à l’école, les aînés travaillent déjà et certains sont mariés. C’est le cas d’Ernestine, la sœur aînée, qui a épousé un Camonois, Jules GEOFFROY avec lequel elle a eu un fils, Marceau. La famille GEOFFROY habite sur la Place, à côté de Philomène et de ses enfants. Car, Philomène est devenue veuve. Alors qu’il a à peine 8 ans, Jules perd son père. La vie va être un peu plus difficile et il est nécessaire de trouver rapidement du travail dès que l’âge légal de 12 ans est atteint.
La culture maraîchère est la principale occupation de la commune, mais les ouvriers trouvent au Chemin de Fer et dans les ateliers ou fabriques de la ville d’Amiens des salaires plus élevés que ne peut leur offrir le travail de la terre. Parmi les 1 500 habitants de la commune, en ce début du XXe siècle, nombreux sont ceux qui partent donc à la journée, travailler à Amiens. On compte également beaucoup de femmes qui travaillent à domicile pour confectionner des vestons, des pantalons, des gilets, ou pour piquer des bottines. Ernestine, la sœur aînée, est giletière à domicile.

Albert et Blanche sont tisseurs chez Monsieur Cocquel, dans la grande manufacture de tissage de velours située dans le quartier Saint-Leu d’Amiens. Le velours a remplacé la laine et la soie tissées précédemment chez Cosserat père. Monsieur Cocquel a augmenté le nombre de métiers à tisser et la mécanisation a débuté. Il y a, au début du XXe siècle, plusieurs appareils qui fonctionnent à la vapeur.
Jules est lui aussi employé dans une fabrique très moderne. Il est serrurier chez Searle, usine de fabrication de boulons et de pièces détachées installée à Boutillerie-les-Amiens, quartier situé dans les marais de la rivière l’Avre, à l’Est de l’agglomération.

Après avoir travaillé à Amiens, c’est également dans la capitale picarde que Jules doit effectuer son service militaire. Jugé apte au service armé par le Conseil de Révision, il est affecté au 72e Régiment d’Infanterie, comme Georges MOUY, maraîcher dans les hortillonnages entre Camon et Amiens, et Henri ANQUET, menuisier dans le village. La caserne Friant n’offre pas vraiment de dépaysement. Jules y retrouve de nombreux copains de Camon ou des quartiers Sud-Est d’Amiens, séparés simplement du village par un pont métallique qui franchit la Somme. Louis DELAHAYE, travaille comme lui chez Searle. Il est contremaître métallurgiste. Gaston GUILBERT, qui habite Rue de l’Egumont, et Alphonse LEROY de Camon également, sont employés au Chemin de Fer.

Le 72e Régiment d’Infanterie est constitué presque exclusivement de jeunes hommes de la Somme. Les Amiénois y sont fortement représentés, mais tous les Conseils de révision du département y envoient de nombreux jeunes pour le service militaire. On parle picard, avec toutes les particularités territoriales de cette langue.

Le 5 août 1914, le 72e RI quitte Amiens par le train pour rejoindre l’Est du pays. La guerre est déclarée. Les jeunes hommes effectuant leur service militaire seront les premiers à combattre pour s’opposer aux troupes du Kaiser Guillaume II.
S’il participe à la Bataille des Frontières, fin août, c’est surtout pendant la Bataille de la Marne, début septembre 1914, que le régiment subit ses pertes les plus lourdes. Les combats se déroulent dans le secteur de Maurupt-le-Montois entre le 7 et le 10 septembre 1914.
Louis DELAHAYE est blessé à l’omoplate gauche par shrapnel. Alphonse LEROY est blessé par balle au mollet gauche. Henri ANQUET est victime de plaies en séton aux deux jambes. Gaston GUILBERT, après avoir été blessé par balle à la joue et à l’épaule gauche, est capturé par les Allemands. Il est soigné au lazaret de Schönebeck, puis transférés dans les camps d’Altengrabow et Wittenburg. La petite équipe des jeunes Camonois est décimée.
Quelques jours plus tard dans la Marne, le 2 octobre, Georges MOUY est déclaré officiellement disparu. Son corps ne sera jamais retrouvé.
Jules HOUBART poursuit les combats en Argonne avec le 72e RI dont la moitié des hommes a déjà été remplacée. En février 1915, Jules est gravement blessé. Il est blessé par balles au mollet, au genou et au scrotum. La douleur est violente. Evacué vers un hôpital de l’Ouest de la France pour y être soigné, il n’en sort que douze mois plus tard. La commission de réforme de Tours réunie le 11 avril 1916 le déclare inapte à poursuivre les combats. Réformé N°1 pour limitation des mouvements du genou droit, fracture du condyle et ablation du testicule droit, il n’est plus en état de se battre. Il peut difficilement marcher et chaque mouvement entraîne de nouvelles douleurs. Julien peut retrouver sa famille tout en n’étant pas officiellement réformé définitivement. Il est régulièrement convoqué devant une commission de médecins militaires chargés d’évaluer si son état lui permet d’être à nouveau mobilisé. En avril 1917 comme en août 1918, la réforme est confirmée. Jules ne retournera pas faire la guerre.

A l’exception de Georges MOUY, tous les copains du village du 72e RI rentrent les uns après les autres. Personne n’est réellement indemne.
Il y a ceux qui boitent comme Alphonse LEROY et Henri ANQUET. Il y a ceux qui sont défigurés comme Gaston GUILBERT. Ceux qui ne retrouveront pas leur capacité respiratoire comme Louis DELAHAYE, dont le poumon droit abrite un débris de shrapnell.
Jules HOUBART tente de reprendre une activité normale après la guerre. Il épouse Ernestine, une jeune veuve rencontrée à l’occasion de sa convalescence près de Nantes. Le couple réside avec Philomène, la mère de Jules, dans la maison familiale de la Place à Camon.

Ernestine travaille comme tisseuse chez Sutcliffe, au Faubourg de Noyon à Amiens. Jules reprend son activité à l’usine Searle. Mais le handicap est trop important pour supporter les difficiles conditions de travail d’ouvrier d’usine. Jules, aidé par son épouse, devient alors laitier à Camon.
Son état de santé se dégradant, le niveau de pension accordée par l’Etat est augmenté en 1924, et son handicap est confirmé à plusieurs reprises. En août 1928, une nouvelle dégradation justifie l’octroi d’une pension de 200 francs supplémentaire.

Jules HOUBART, handicapé de guerre, décède à Camon le 26 mai 1930, à l’âge de 39 ans. Son nom n’est pas inscrit sur le monument aux morts de la commune. Jules n’a pas eu d’enfant.
Lionel JOLY et Xavier BECQUET
« De la Somme à Bellefontaine – 22 août 1914 » – recherche collaborative 1891, 1892, 1893 – Département Somme. Francis et Brigitte DANEZ ont réalisé la collecte de données pour la commune de Camon.
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