Né le 7 juillet 1891, Louis DELHOMEL se prénomme Louis, comme son père.
Faubourg éloigné du centre d’Amiens et de ses anciens remparts, Montières est un village pour tous ceux qui y habitent. Peu d’entre eux se disent Amiénois. C’est à Montières que naît Louis. Son père Louis est journalier et sa mère, Marie est ménagère. Issus de familles de conditions très modestes, Louis et Marie souhaitent fonder une famille. Ils s’installent Route d’Abbeville où le petit Louis vient au monde.
La famille n’ira pas plus loin que trois membres. Louis « le jeune » reste enfant unique.
A part quelques cultivateurs et quelques commerçants, les maisons de la Route d’Abbeville sont presque toutes des maisons d’ouvriers. Au début du XXe siècle, beaucoup d’hommes et de femmes travaillent dans l’industrie textile. Ils sont nombreux à emprunter le chemin de halage pour se rendre aux usines CARMICHAEL, à Ailly-sur-Somme, ou chez les tisseurs PARISON, ESNAULT, la Société LINIERE ou autres. Louis « le jeune » est employé très tôt comme tisseur chez ESNAULT.
D’autre part, plusieurs voisins travaillent comme terrassiers ou charretiers chez MUCHEMBLED ou chez BUHANT, grandes entreprises de travaux publics. Les grands travaux à Amiens, notamment avec l’agrandissement de la ville vers le Sud, nécessitent beaucoup de bras. Louis DELHOMEL, le père, est terrassier.
Enfin, le travail ne manque pas pour les ouvriers du quartier. Scieries, distilleries, ateliers de mécanique. Beaucoup de voisins travaillent chez « La France », dans l’outillage agricole. Il faut juste ne pas être trop exigeant pour le salaire. Pour cette raison, les ouvriers changent souvent d’employeur, en espérant ce « mieux » qui n’arrive pas toujours. Le père de Louis passe de MUCHEMBLED à BUHANT. Louis passe du tissage à la scierie. Seuls les employés de bureau et ceux qui travaillent pour les chemins de fer semblent plutôt satisfaits de leur situation. Mais il faut au moins savoir lire et écrire.
Louis DELHOMEL a été un bon élève. Il a suivi avec assiduité les cours de Monsieur VIGNOLLE, l’instituteur de Montières. Mais à douze ans, comme tous ses camarades du quartier, il a fallu abandonner les bancs de l’école pour gagner un salaire.
Quand arrive l’heure du service militaire, Louis se dit qu’il va peut-être trouver sa voie dans l’armée. Il est incorporé le 10 octobre 1912 au 29e Bataillon de Chasseurs à Pied caserné à Saint-Mihiel dans la Meuse. Il s’y sent bien et il évolue rapidement dans la hiérarchie militaire. Promu caporal en 1913, il devient sergent, grade qui est le sien à la déclaration de guerre d’août 1914.
Comme pour beaucoup de soldats français, la guerre est une succession de combats et de découvertes de nouveaux champs de bataille. Fin août 1914, Louis DELHOMEL combat à Boncourt, dans la Meuse. En septembre, c’est la Bataille de la Marne et le Bois des Loges. A partir de la fin de l’automne 1914, il est dans le Pas de Calais. Le 22 décembre, il est évacué d’Hébuterne, suite à une entorse du pied puis, après avoir été soigné à l’hôpital de Pas-en-Artois, il revient au front. Après plusieurs mois en Artois, le 29e BCP repart en Champagne et ensuite il combat dans le secteur de Verdun. Louis est promu adjudant.
Ce sont ensuite les champs de bataille de la Marne près de Sillery, à l’été 1916 puis ceux de la Bataille de la Somme dans les secteurs de Sailly-Saillisel et Cléry-sur-Somme. Au printemps 1917, Louis commande son groupe de soldats pour l’offensive du Chemin des Dames. Les pertes y sont très nombreuses et malgré son engagement dans les combats Louis s’en sort toujours indemne. Le 29e BCP quitte début juin 1917 la région pour mener d’autres batailles en Alsace. Au printemps 1918, quand les Allemands lance l’opération Michaël, ultime offensive d’envergure visant à aller prendre Paris, le 29e BCP est rappelé d’Alsace. C’est dans la Somme qu’il faut arrêter les Allemands, à la fin du mois de mars 1918. Louis DELHOMEL, le petit gars de la Route d’Abbeville, revient dans la Somme, pour participer à de terribles combats dans le secteur de Montdidier, marquant un coup d’arrêt dans la progression des troupes ennemies. Si les hommes 29e BCP n’ont pas participé à tous les combats une arme à la main, ils ont contribué à permettre la circulation des informations stratégiques entre les différentes unités, y compris sous les bombardements. Plusieurs citations à l’ordre du régiment mettent en avant le « grand calme » de Louis, le considérant comme un « adjudant pionnier, calme et courageux ».
Louis participe à la dernière offensive française et alliée du mois d’août 1918. « Pendant les combats du 16 au 24 août et à plusieurs reprises, a organisé des chaînes de coureurs sous de violents bombardements ». Il n’est démobilisé que le 11 mars 1919. Louis DELHOMEL reçoit la Croix de guerre avec deux étoiles de bronze.
Louis DELHOMEL a été un brillant sous-officier qui a sillonné le front de l’Ouest, de l’Artois jusqu’à l’Alsace, pendant plus de quatre années. Il a quitté Montières à l’âge de 21 ans. Il a presque 28 ans quand il y revient. Après 7 années d’horreur… Que va devenir sa vie civile ?
Après sa démobilisation, Louis revient chez ses parents et devient scieur. Le 21 décembre 1919, il épouse Yvonne. Le couple s’installe chez les parents de Louis, Route d’Abbeville à Montières. Le père et le fils sont employés à la scierie BULOT et la belle-fille s’y fait embaucher comme employée de commerce, pendant que Marie, la mère de Louis, garde le petit bébé du jeune couple, premier enfant prénommé Louis comme son père et son grand-père. Une fille prénommée Ginette viendra compléter la fratrie.
Pendant la guerre, près de 1 800 hommes du 29e BCP ont perdu la vie. Louis DELHOMEL n’a jamais pu oublier que parmi eux il y avait Raymond DELAPORTE d’Amiens, Gustave DAUSSY de Cardonnette et Victor COZETTE de Camon. Les trois copains avec lesquels il avait pris le train en gare d’Amiens, le 10 octobre 1912 pour rejoindre la caserne à Saint-Mihiel. Eux ne sont pas revenus dans la Somme. Aucun des trois copains n’a dépassé l’âge de 25 ans.
Le père du petit Louis et de Ginette, le grand-père de Michel, Louis DELHOMEL le calme et courageux adjudant du 29e BCP est mort le 26 février 1978 à Amiens à l’âge de 86 ans. Personne n’a jamais su de quels rêves et cauchemars ont été emplies ses nuits…
Lionel JOLY et Xavier BECQUET


« De la Somme à Bellefontaine – 22 août 1914 » – recherche collaborative 1891, 1892, 1893 – Département Somme. André MELET a réalisé la collecte de données pour la commune d’ Amiens.
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