ILS AVAIENT 20 ANS EN 1914 – Hilaire ABADIE de Fransart

Né le 8 septembre 1891, Hilaire ABADIE voit le jour à Fransart, dans la Somme.

Il est le premier enfant d’Hilaire et de Patricia. Hilaire le père, travaille comme ouvrier agricole dans les fermes de la commune. La petite famille réside rue d’Hattencourt à Fransart.

Fransart est un village du canton de Rosières, dans l’arrondissement de Montdidier. Un village dont le territoire, situé en plein Santerre, est absolument plat. Le sol est constitué de « limon des plateaux » et en cette fin de XIXe siècle, la presque totalité des 183 habitants de Fransart vit de l’agriculture. Il y a 23 exploitations agricoles. On cultive majoritairement des céréales et des betteraves à sucre.

Une fabrique de sucre est située, en partie dans la commune et en partie sur le territoire du village d’Hattencourt. C’est Monsieur BRUN, originaire de Marseille, qui en est le patron. Il habite sur place avec son épouse, ses trois filles et les jumeaux, Henri Edouard et Paul Léon, du même âge qu’Hilaire. Mais le monde des jumeaux BRUN n’est pas celui d’Hilaire ABADIE.

« Les habitants ne sont pas malheureux à Fransart et les maisons sont plutôt confortables », comme le dit l’instituteur du village. La terre du Santerre est fertile. Les produits des champs, des jardins et des basse-cours s’écoulent très facilement sur les marchés de Méharicourt ou de Roye.

La famille ABADIE s’agrandit. Trois garçons viennent compléter la fratrie, Jules, Albert et Marcel, suivis par deux filles, Noémie et Marie-Louise.

Les enfants partagent leur temps entre les chemins, les pâtures, les cours de ferme et les bancs de l’école. Ils aiment aussi aller à la gare regarder passer les trains. La gare d’Hattencourt-Fransart est située sur la ligne reliant Saint-Just-en-Chaussée à Douai. Les bâtiments de la sucrerie sont installés sur le territoire des deux communes. La gare l’est également. La voie ferrée relie la ligne Paris-Amiens à la ligne Amiens-Lille en passant par l’Est du département de la Somme. Le village de Fransart est donc bien desservi par le train. Au lieu-dit « La Gare », il y a trois maisons. On y trouve le chef de gare, Narcisse TISON, le cantonnier et son épouse qui officie comme garde-barrière et le débitant de boissons Adolphe BERTEAU. Raymond THIBAUT, le fils du cantonnier et de la garde-barrière est du même âge qu’Hilaire ABADIE.

A 20 ans, le Conseil de Révision de Rosières juge Hilaire ABADIE apte pour effectuer le service militaire. Il est incorporé au 120e régiment d’infanterie de Péronne qu’il rejoint le 10 octobre 1912.

Nombreux sont les jeunes de l’Est de la Somme à avoir fréquenté la caserne Foy de Péronne pour y faire leur service militaire ou pour y subir régulièrement des périodes d’entraînement. Il faut en effet attendre d’avoir atteint l’âge de 45 ans pour être définitivement libéré des obligations militaires. Les Péronnais sont habitués à la présence des hommes du 120e qu’ils côtoient souvent dans les rues de la cité.

Après une année d’instruction militaire, remplie de bons moments de camaraderie partagés avec des jeunes hommes du même âge venus de tout le département, Hilaire quitte Péronne. Le 120e est transféré dans la Meuse, à Stenay.

En juillet 1914, le début de la guerre semble imminent. Le régiment, positionné à quelques kilomètres des frontières avec la Belgique et le Grand-Duché du Luxembourg, se tient prêt. Le 26 juillet, tous ceux qui étaient partis en permission dans le cadre des permissions agricoles, sont rappelés d’urgence. Prévenus par les gendarmes, ils doivent rejoindre, au plus vite, leur caserne.

Même si plusieurs compagnies du 120e RI participent aux combats de Mangiennes, dans la Meuse, le 10 août, c’est bien à Bellefontaine en Belgique, le 22 août, qu’il reçoit l’épreuve du feu. Ou plutôt qu’il découvre l’horreur de la guerre.

Aquarelle de Nestor Outer (Musée de Virton)

Près de 1 000 hommes du régiment sont mis hors service en quelques heures. Des centaines de copains de la Somme sont tués ou blessés. Hilaire est rescapé mais profondément traumatisé. La guerre vient à peine de débuter et des centaines de copains du 120e sont tués, blessés ou disparus. L’offensive du général Joffre est un échec cuisant. On compte au moins 25 000 morts côté français. En une seule journée ! La retraite devient inévitable.

Moins de deux semaines plus tard, le 120e est positionné au Sud de la Marne. La Bataille de la Marne se prépare. L’ordre est donné aux hommes des régiments de la région militaire d’Amiens de « résister jusqu’à la mort« . Le 120e doit interdire aux Allemands l’accès aux ponts sur le canal de la Marne et sur la Saulx et défendre la ville de Sermaize-les-Bains.

Le 8 septembre, Hilaire ABADIE est blessé à la tête, par balle. Evacué, il est immédiatement transporté vers un hôpital de l’arrière. La blessure est grave. Ce n’est qu’une année plus tard, après de nombreux séjours de soins et de convalescence, qu’Hilaire revient au front. Il n’y retrouve presque plus aucun de ceux qui ont débuté la guerre à ses côtés.

Au printemps 1916, Hilaire est transféré au 147e  RI. Après quelques mois de formation comme mitrailleur, il rejoint les rangs du 36e Régiment d’Infanterie pour le reste de la guerre. Il obtient la Croix de Guerre en novembre 1917. C’est lors de la bataille de la reconquête de la région de Lassigny qu’il est blessé très grièvement le 11 août 1918. Après une évacuation sur un hôpital de Beauvais, il est transféré dans la région de Tours pour y poursuivre des soins intensifs. Il est hospitalisé ensuite à Castres dans le Tarn. Il est hospitalisé ensuite à Castres dans le Tarn.

Après sa libération au printemps 1919, il part sur Fresnoy-les-Roye où il se marie. Il fonde une famille dans ce village mais ne reviendra plus vivre à Fransart. Il s’occupera des Anciens Combattants au sein de la F.N.C.R. dont il deviendra président au niveau local et recevra la médaille militaire en 1956 pour sa conduite au cours de la Grande Guerre.

Hilaire ABADIE est mort le 7 avril 1961, à l’âge de 69 ans.

Son copain, Raymond THIBAUT, le fils du Café de la Gare, parti vivre à Maubeuge peu de temps avant le début de la guerre, a été fait prisonnier civil par les Allemands, dès août 1914. Il a enduré des conditions difficiles de captivité. Libéré peu de temps après l’Armistice, il est retourné vivre à Maubeuge.  C’est dans cette ville du Nord qu’il est mort, le 30 mars 1928.

La guerre n’a pas épargné la classe bourgeoise. La sucrerie a été détruite par les combats des derniers mois de la guerre. Mais, là n’est pas le plus grave pour Charles Edouard, le patron. Son fils, Henri Edouard BRUN, a été tué dès les premières semaines. Il est tombé à Maurupt, dans la Marne, le 9 septembre 1914. Son jumeau, exempté au moment de la mobilisation générale pour un problème de genou, a été emmené en captivité en Allemagne, comme prisonnier civil. Il en est sorti vivant et a été rapatrié en décembre 1918. Vivant mais affaibli et marqué à tout jamais. Paul Léon BRUN est mort, comme Raymond THIBAUT, le fils du cafetier, au début de l’année 1928.

Lionel JOLY et Xavier BECQUET

Les paragraphes concernant le parcours d’Hilaire ABADIE à partir de 1916 jusqu’à sa mort sont écrits dans leur intégralité par son petit-fils.

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6 commentaires sur « ILS AVAIENT 20 ANS EN 1914 – Hilaire ABADIE de Fransart »

  1. La biographie de mon grand-père Hilaire ABADIE présente des erreurs et des lacunes à partir de 1916. Son passage au 147e fut temporaire. En effet, après quelques mois de formation comme mitrailleur, il rejoint les rangs du 36e d’infanterie pour le reste de la guerre. Il obtient la Croix de guerre en novembre 1917. C’est lors de la bataille de reconquête de la région de Lassigny qu’il est blessé très grièvement le 11 août 1918. Après une évacuation sur un Hôpital d’évacuation à Beauvais, il sera envoyé dans des hôpitaux de la région de Tours pour y continuer des soins intensifs. Enfin le 11 novembre 1918, l’annonce de l’armistice le surprend à l’hôpital de Castres dans le Tarn où il achève sa convalescence. Après sa libération au printemps 1919, il part sur Fresnoy-les-Roye où il épouse ma grand-mère. Il fonde une famille dans ce village mais ne reviendra plus vivre à Fransart. Il s’occupera des Anciens Combattants au sein de la F.N.C.R. dont il deviendra président au niveau local et recevra la médaille militaire en 1956 pour sa conduite au cours de la Grande Guerre.

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