ILS AVAIENT 20 ANS EN 1914 – Alfred HECQUEFEUILLE de Saint-Ouen

Né le 27 juin 1892, Alfred HECQUEFEUILLE est le fils d’Henri HECQUEFEUILLE et de Pauline GONDROYE.

Tous deux sont issus de familles originaires du Pas-de-Calais. Henri est né à Frévent et Pauline à Buire-le-Sec.

Leurs parents ont franchi l’Authie, limite naturelle entre les départements du Pas-de-Calais et de la Somme, pour s’installer à Saint-Ouen dans la vallée de la Nièvre pour y trouver du travail.

Dans la Somme, l’activité textile marque de son empreinte, en cette fin de XIXe siècle, la Vallée de la Nièvre et une partie de la vallée du fleuve Somme, entre Amiens et Abbeville. Berteaucourt-les-Dames, Flixecourt, L’Etoile, Condé-Folie, les usines de Charles SAINT et de ses frères ont transformé les paysages. Loin de se contenter d’implanter des lieux de production de toilerie, de velours et de corderie, les frères Saint ont construit des cités ouvrières gigantesques pour y loger les travailleurs au plus près des usines. Le paternalisme des SAINT a abouti à ce que ces cités deviennent des lieux de vie avec la mise en place de magasins coopératifs, de services sociaux, d’écoles. Des voies de chemin de fer privées ont été construites par les patrons pour, à la fois relier les usines entre elles, mais aussi les relier au réseau des Chemins de fer du Nord.

Dans la Somme, plus de 9 000 ouvriers travaillent dans et pour l’empire des Frères SAINT.

Chaque usine a sa spécialité. A Saint-Ouen, commune où grandit Alfred HECQUEFEUILLE, les ouvriers fabriquent essentiellement de la corderie et de la « cordagerie ».

Le premier enfant d’Henri et de Pauline se prénomme Henri comme son père. Il naît le 4 janvier 1884 dans la petite maison familiale de la ruelle Blond à Saint-Ouen.

Georges naît en 1887 puis Henriette en 1890, Alfred en 1892, Laurent en 1894, Clémence en 1897.

Les parents ne sont pas mariés. Ils ne « régularisent » leur situation pour assurer la reconnaissance officielle des enfants qu’en 1905, année où ils échangent leurs consentements devant le maire de Saint-Ouen.

Les enfants, dès qu’ils atteignent l’âge de douze ans, rejoignent leur père dans l’entreprise de Monsieur Charles. Henri est tourneur en fer dans l’usine de Saint-Ouen. Georges et Henriette sont fileurs.

Alfred devient cordier. Les enfants HECQUEFEUILLE sont, selon les besoins, cordiers, fileurs ou peigneurs.

La commune est une véritable fourmilière au début du XXe siècle. Alors que Saint-Ouen, petit village agricole, comptait moins de 700 habitants avant l’implantation de l’usine de textile, on y compte, en 1911, plus de 3 300 Saint-Ouennais. Ils sont originaires de communes de toute la Somme, mais aussi du Pas-de-Calais, comme les parents d’Alfred ou de bien plus loin. Saint-Ouen n’est plus un village agricole, mais bien une ville ouvrière.

Alfred HECQUEFEUILLE est incorporé, en octobre 1913, au 128e Régiment d’Infanterie d’Abbeville pour y effectuer son service militaire.

Dans les premiers mois de guerre, bien que mobilisé, Alfred n’est pas envoyé combattre. Il est classé en service auxiliaire, en raison de son mauvais état de santé, jusqu’en février 1915. Puis, séparé de ses copains de la Somme, il change à plusieurs reprises d’affectation : 148e RI, 147e RI et 33e RI. Avec ces régiments, il combat dans l’Aisne, autour de Verdun, dans la Somme. C’est d’ailleurs pendant la Bataille de la Somme, en septembre 1916, qu’il est blessé. Après une courte convalescence, Alfred revient.

Il est déclaré disparu le 15 juillet 1918 dans la Marne à Bouquigny. Trois années plus tard, le tribunal de Doullens le déclare « tué à l’ennemi ».

A l’inverse d’Alfred, la guerre a été courte pour Laurent, le frère cadet. Mobilisé dès le mois d’août 1914 et affecté au 51e Régiment d’Infanterie de Beauvais pour y suivre plusieurs semaines d’instruction militaire, Laurent a été tué presque dès son arrivée au front. Il est mort le 31 décembre 1914, dans le secteur de Vienne-le-Château. Il est tombé au même endroit et le jour même où son beau-frère, Pierre DESFONTAINE, le mari d’Henriette HECQUEFEUILLE, a été capturé par les Allemands. Il n’a été rapatrié que le 28 janvier 1919.

Après la guerre, la Ruelle Blond est devenue la Rue Victor Hugo, mais rien n’a vraiment changé à Saint-Ouen. De nouvelles familles sont arrivées dans la vallée pour vivre du textile et bénéficier d’une forme de « confort » de vie malgré des conditions de travail souvent bien pénibles.

Le fils aîné, Henri, a repris la maison des parents où il a vécu avec son épouse, Marie, tout en travaillant à l’usine Saint. Ce n’est plus Monsieur Charles le directeur, mais son fils.

Henri HECQUEFEUILLE, l’aîné de la fratrie, a eu lui aussi un fils. Il l’a prénommé Henri, comme son père l’avait fait pour lui.

Mais le petit Henri ne verra jamais ses oncles Alfred et Laurent vieillir. Leur vie s’est arrêtée alors qu’ils n’avaient que 26 et 20 ans.

Les noms des deux frères HECQUEFEUILLE sont inscrits sur le monument aux morts de Saint-Ouen.

Lionel JOLY et Xavier BECQUET

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