Né le 3 septembre 1892 à Franleu, Hubert RICHARD est le fils de Gustave RICHARD et de Mathilde NORROY.
Jules RICHARD, le grand-père paternel d’Hubert, était jardinier au château, tout comme son frère Auguste. Les frères RICHARD travaillaient pour Monsieur Alexandre, le châtelain de Franleu. Ils étaient autant jardiniers ou bûcherons qu’hommes à tout faire dans la propriété. Alexandre de BONIJOL DU BRAU avait épousé en secondes noces Calixte, jeune femme originaire de la Martinique, de trente ans sa cadette. Si les BONIJOL et les BRAU sont des familles aristocratiques du Sud de la France, leurs descendants installés à Franleu se considèrent maintenant comme de vrais picards, pleinement intégrés dans le village.

A Paris, le père de Mathilde était nourrisseur et sa mère était coloriste. Rien à voir avec l’activité qui est la sienne à Franleu, après son mariage avec Gustave. Les deux jeunes mariés tiennent une épicerie – débit de boisson Rue de Haut à Franleu. Gustave et Mathilde se sont mariés en 1887 à Friville-Escarbotin où la jeune fille résidait après avoir quitté Paris.
Hubert est le second enfant du couple formé par le Franleusien et la Parisienne. Sa soeur aînée se prénomme Léontine. Leurs parents tout en continuant l’activité de débitant, exploitent une petite ferme.
Hubert passe la plupart de son temps avec les garçons de la rue qui ont le même âge que lui. Il y a Louis GRENON, le fils du sabotier, Victor CAUDRON, le petit-fils du garde-champêtre et Hector BERTRAND, dont le père travaille au château comme jardinier. Ils sont ses principaux camarades de jeu de la Rue de Haut.
Ils fréquentent les mêmes bancs de la classe de Monsieur MOMY, les mêmes sièges d’église écoutant avec beaucoup d’attention les sermons de l’abbé GAFFE et ils aiment aussi et surtout se promener dans les chemins et les pâtures autour du chef-lieu. Le territoire de la petite commune de 600 habitants est situé sur un plateau dans le verdoyant pays du Vimeu maritime entre Quesnoy-le-Montant et Ochancourt, à une quinzaine de kilomètres de Saint-Valery-sur-Somme.

Adolescents, les enfants suivent souvent les traces de leurs parents quand il s’agit de trouver un emploi. Hubert RICHARD aide ses parents. Il apporte son aide dans le débit de boissons-épicerie de sa mère et dans la ferme de son père de la Rue de Haut. Louis GRENON devient apprenti-cordonnier. Hector BERTRAND travaille avec son père au château comme jardinier. Quant à Victor CAUDRON, il ne devient pas garde-champêtre comme son grand-père mais cordonnier… comme son père.
En 1905, Léontine, la soeur aînée d’Hubert RICHARD, épouse le fils du fermier voisin. Elle devient madame ROSANT Octave. Le beau-frère d’Hubert est charpentier.
Quand Hubert est convoqué devant le Conseil de Révision à Saint-Valery-sur-Somme, ses copains légèrement plus âgés que lui, sont déjà partis au service militaire depuis plusieurs mois.
Jugé apte au service armé, Hubert RICHARD rejoint le 128e Régiment d’Infanterie à Abbeville le 10 octobre 1913.

Le 5 août 1914, le 128e RI quitte ses locaux d’Abbeville et d’Amiens pour se rendre à Dun-sur-Meuse. La guerre vient d’être déclarée et les régiments picards quittent la région pour l’Est de la France. Les troupes allemandes viennent d’entrer dans le Nord-Est de la Belgique. Dans quelques jours, elles tenteront d’envahir le territoire français.
Le 128e RI connaît ses premiers combats le 22 août, près de Virton. Pendant la retraite qui suit, les 2e et 3e bataillons du 128e sont missionnés pour arrêter la progression des Allemands, lancés à la poursuite des soldats français, dans le hameau de Fontenois, près de Saint-Pierremont en Ardennes. Plusieurs compagnies sont décimées le 31 août. Hubert RICHARD, affecté au 1er bataillon, a échappé au combat, mais le retour des copains, le 1er septembre, est particulièrement traumatisant. Il manque plus de 300 hommes. Parmi les disparus, Fernand RASSE, un copain de Franleu, fils de fermier de la Rue d’Arrest.
A partir du 6 septembre, pour toutes les troupes françaises rassemblées dans le département de la Marne, les combats sont particulièrement meurtriers. Les hommes du 128e sont positionnés dans le secteur de Maurupt-le-Montois. Hubert RICHARD, blessé à la jambe gauche le 8 septembre, est évacué.

Après trois mois d’hospitalisation et de convalescence, il revient au front en Argonne. En juillet 1915, il est évacué pour faiblesse générale et anémie vers l’hôpital de Besançon. Trois mois plus tard il retrouve son régiment. Evacué à plusieurs reprises pour maladie, pour amaigrissement, et en février 1917 pour un abcès dentaire, Hubert sait qu’il faut retourner à chaque fois dans l’enfer des combats. Hubert n’est pas un tire-au-flanc. Il a d’ailleurs été promu caporal. Mais son état de santé se détériore après chaque retour au front.
Le 20 février 1918, dans le secteur de Réchicourt-la-Petite au nord de la forêt de Narroy en Meurthe-et-Moselle, Hubert est à nouveau blessé. Déjà touchée par un éclat d’obus en septembre 1914, sa jambe gauche est à nouveau meurtrie gravement par l’éclat d’un obus. La guerre est finie pour le caporal RICHARD. Il sort de l’hôpital le 14 novembre 1918. L’Armistice vient d’être signé. Envoyé au dépôt du régiment, Hubert n’est démobilisé qu’en août 1919. Il revient alors à Franleu. Une pension lui a été octroyée pour rétrécissement de la jambe gauche avec raideur du coup de pied.

Que sont devenus les copains de Franleu ?
Victor CAUDRON, blessé lui aussi à la jambe, est revenu à Franleu après la guerre. Boiteux mais vivant !
C’est à la jambe également que Louis GRENON a été touché, le 17 octobre 1915, au Bois de la Gruerie. Mais la plaie s’est infectée et dans l’ambulance située à l’arrière du front, il a fallu procéder à l’amputation. Louis GRENON n’a pas survécu. Il est mort le 5 novembre.
Après avoir « enlevé d’un bel élan une position allemande » Hector BERTRAND a été tué, le 17 avril 1917 dans la Marne « à son poste en repoussant une violente contre-attaque ennemie ». 150 francs ont été versés à sa veuve.
Quant au copain de la Rue d’Arrest, disparu au début de la guerre, il est revenu. Fernand RASSE, blessé à Fontenois le 31 août 1914, a été capturé par l’ennemi. Blessé à l’arrière de la tête, il a été transporté au lazaret de Trier, où il a été soigné. Il a ensuite vécu toute la guerre dans les camps de prisonniers allemands de Coblenz et Göttingen à Langensalza. Lui aussi est revenu en boitant, gardant pour toujours dans la jambe droite, un morceau de shrapnel non enlevé.
Dans le village, les hommes plus âgés ont souffert également. Adéodat, l’oncle d’Hubert RICHARD, mobilisé à 42 ans, a perdu l’usage de son genou droit. Le cousin Marcel, rappelé à 45 ans, ne reviendra pas. Après quelques mois de front, il est mort de la fièvre typhoïde.
Octave ROSANT, le beau-frère d’Hubert, mobilisé en août 1914, a été renvoyé dans ses foyers en mars 1915. Il a bénéficié de cette faveur comme père de 8 enfants. Octave n’avait pas été blessé. Il a pu retrouver son épouse, Léontine et ses enfants. La fratrie des ROSANT s’est encore agrandie dans les années suivantes.
Hubert RICHARD a poursuivi sa vie à Franleu. Il est revenu dans la petite ferme de ses parents. Puis il a quitté ses parents pour s’installer Rue d’Egypte.

Dans les années 1930, Hubert RICHARD a occupé la fonction de garde-chasse de la Société de Franleu. Après le décès de sa première épouse, Anne BOCLET, Hubert a épousé Simonne BOULANGER. Il est devenu père de deux petites filles prénommées Annette et Guislaine. Deux enfants que la guerre ne viendra pas lui prendre.
En 1921, un monument aux morts a été érigé dans le cimetière situé autour de l’église Saint-Martin, au cœur du village. Derrière chaque nom inscrit, Hubert y voyait un visage bien connu. Des jeunes hommes de Franleu qui n’ont pas eu la chance, comme lui, de revenir vivant. Boiteux mais vivant…
Lionel JOLY et Xavier BECQUET
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