UN JOUR, UN PARCOURS – Paul ROYER de Candas

Victimes de la Première Guerre mondiale – une Somme de vies brisées par 14 18.

Né le 10 janvier 1892, Paul ROYER est le petit dernier de la fratrie.

Achille son père et Orpha sa mère sont tous deux originaires de Candas, commune située dans le canton de Bernaville, au Nord du département de la Somme. C’est dans cette commune que naît Paul.

Il n’était plus vraiment attendu. Achille et Orpha se sont mariés en 1876, donnant naissance à Alphonsine, en 1877 et à Gustave, en 1879. Paul vient au monde treize ans plus tard dans la petite maison des ROYER, Rue de Longueville, maison qui sert également de commerce pour l’activité du père. Achille, qui était tisserand quand ses deux premiers enfants sont nés, est devenu perruquier. Personne ne porte de perruque à Candas en cette fin de XIXe siècle. Achille coupe les cheveux de ses concitoyens.

Quelques années plus tard, Auguste, le fils aîné, prend la relève de son père, lequel retrouve alors le métier de tisserand qui était le sien précédemment.

Auguste a terminé depuis longtemps son service militaire quand Paul, son petit frère, âgé de 20 ans, est convoqué devant le Conseil de Révision à Bernaville. Après avoir passé deux années chez les cavaliers du 6e Régiment de Hussards, Auguste est considéré comme réserviste et à ce titre effectue une période d’exercice tous les trois ans.

Paul ROYER est incorporé au 128e Régiment d’Infanterie à Amiens. C’est le 8 octobre 1913 qu’il quitte Candas. Il est accompagné par son copain Gaston ANCELLE. Les deux garçons, qui habitent à quelques mètres l’un de l’autre, dans la Rue de Longueville, ont tout partagé depuis l’enfance. Mais ils ne seront pas ensemble pour les trois années de service militaire qui les attendent. Gaston vient de se faire employer comme cantonnier au Chemin de Fer, métier qui lui ouvre les portes du Génie. Il rejoint, comme sapeur, le 5e Régiment de Génie.

Ils prennent le train à Candas en direction d’Amiens, destination de leur séparation, Gaston ANCELLE poursuivant vers Paris, avant d’atteindre Versailles où est caserné le 5e Régiment de Génie.

Même s’il n’est pas seul à marcher de la gare à la Citadelle d’Amiens, Paul ROYER n’est pas vraiment à l’aise. Le monde militaire est parfaitement inconnu et l’entrée des nouveaux appelés peut toujours susciter quelques blagues de la part des plus anciens, pas toujours très agréables pour celui qui en est la victime. Mais Paul est rassuré  quand il retrouve, peu de temps après son arrivée, des copains de Candas incorporés ici depuis douze mois déjà, Albert BOUCHER, Eugène GUILLEMANT et Albert DUMETZ.

Albert BOUCHER habite Rue de la Croix. Eugène GUILLEMANT vit et travaille à la ferme de sa mère, devenue veuve, Rue de Montrelet. Albert DUMETZ, lui, est tisserand. Il réside dans la Rue Autour de l’Eglise.

Quelques semaines après l’incorporation de Paul, arrive un cinquième larron. Le 28 novembre 1913, c’est au tour d’Oscar CAVILLON de connaître l’angoisse de l’inconnu, suivie par la joie de découvrir des visages bien connus. Oscar habite Rue des Juifs à Candas.

Le 5 août 1914, le 128e RI quitte Amiens par le train. La guerre est déclarée et le régiment doit partir pour Dun-sur-Meuse, au Nord de Verdun. Albert BOUCHER n’est pas du voyage car, suite à une maladie, il est en convalescence. Il ne rejoint ses copains qu’à la mi-septembre.

La guerre a déjà fait couler beaucoup de sang en quelques semaines. Quand Albert arrive dans la Marne, le 14 septembre 1914, le copain Oscar CAVILLON n’est plus là. Blessé au coude par balle et au genou par éclat d’obus, à Fontenois, en Ardennes, le 31 août, il est resté sur place pour être soigné par les médecins du régiment. Le lendemain, les Allemands ont fait prisonniers tous les Français encore présents à Fontenois, blessés et personnel soignant. Oscar ne reverra plus le sol français avant la fin janvier 1919.

Albert BOUCHER ne reste pas longtemps en Argonne. A peine guéri de la maladie qui lui a fait manquer le début du conflit, il est victime de la fièvre typhoïde début octobre. Hospitalisé à Sainte-Menehould, il est transféré vers l’hôpital de Châtel-Guyon dans le Puy-de-Dôme.

Le 9 novembre 1914, Eugène GUILLEMANT, blessé à la main et à l’épaule par balle dans le Bois de la Gruerie, quitte le front.

Albert DUMETZ malade, est évacué au début de l’été 1915. Une fois guéri, il est affecté au 48e Régiment d’Infanterie.

Paul ROYER se retrouve bien seul au sein du 128e. La bande des 5 copains de Candas n’existe plus. Oscar CAVILLON est prisonnier en Allemagne, Albert BOUCHER vient d’être muté au 72e Régiment d’Infanterie et Eugène GUILLEMANT termine sa convalescence, avant de rejoindre le 116e RI. Comme tous les régiments, le 128e n’a plus d’identité régionale. Constitué, au début de la guerre, presque essentiellement de jeunes hommes de la Somme, il est devenu un régiment aux accents régionaux multiples et où être copain signifie juste fréquenter la même tranchée.

Evacué plusieurs fois pour maladie, Albert DUMETZ survit à la guerre. Eugène GUILLEMANT est gravement blessé à plusieurs reprises. Déclaré inapte à faire campagne, il est détaché à la garde des prisonniers de guerre à Dieppe en 1918 et est démobilisé en mars 1919. Albert BOUCHER est blessé au dos par éclat d’obus à Bouchavesnes, dans la Somme, à l’automne 1916 puis il est blessé encore une fois en juillet 1918. Cette fois-ci c’est le genou qui est touché. Mais la plus terrible des atteintes est celle subie à Villers-Cotterêts en août 1918. Albert BOUCHER est intoxiqué par ypérite. Evacué vers Tours, puis Montauban, il ne combattra plus gardant, même longtemps après l’Armistice, les séquelles de cette intoxication.

Oscar CAVILLON est passé par les des camps allemands d’Erfurt et de Darmstadt. Il est rapatrié le 23 janvier 1919. A son retour et après 4 semaines de repos, il est remobilisé pour participer au maintien de l’ordre et est affecté, comme à l’époque du service militaire, au 128e RI. Il n’y trouve plus aucun visage connu. En presque cinq années, les victimes du régiment se comptent par milliers.

Gaston ANCELLE, le voisin de Paul ROYER de la Rue de Longueville, est aussi revenu vivant à Candas. Parti avec son régiment du Génie en Orient fin 1915. Il a été cité à l’ordre du régiment pour des faits de bravoure au cours d’opérations topographiques. Mais le paludisme a eu raison de sa bravoure. Gaston a été évacué sur la base navale française et la fin de sa guerre s’est surtout passée dans un lit d’hôpital. Après la démobilisation, il a retrouvé un emploi aux Chemins de fer et est devenu contrôleur adjoint.

Paul ROYER n’est pas revenu à Candas. Le 4 mai 1917, il voit la mort de près. Blessé par grenade à la face, dans le secteur du Godat, près de Berry-au-Bac, dans les combats du Chemin des Dames et soigné à l’arrière, il revient au front six semaines plus tard. Mais en juillet 1918, la chance l’abandonne à Rozet-Saint-Albin, au Sud de Soissons. Paul ROYER est tué à l’aube du 20 juillet 1918. Il est 5h30. Paul ROYER a 26 ans.

Orpha a perdu son fils. Devenue veuve, elle a vécu après la guerre chez son fils aîné Gustave, avec sa belle-fille et ses petites-filles. Gustave, mobilisé en août 1914 au service de réquisitions des chevaux puis au 15e Escadron du Train, a survécu sans trop de séquelles physiques. Mais Gustave, ayant perdu son petit frère, et Orpha, pleurant un fils, sont aussi devenus des victimes de la Grande Guerre. Leurs noms ne sont pourtant inscrits nulle part.

Sur le monument aux morts de Candas figure l’inscription : « 1918 – ROYER PAUL SOLDAT ».

Lionel JOLY et Xavier BECQUET

De la Somme à Bellefontaine – 22 août 1914 » – recherche collaborative 1891, 1892, 1893 – Département Somme.  Lionel JOLY a réalisé la collecte de données pour la commune de Candas.

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