ILS AVAIENT 20 ANS EN 1914 – Eugène LAVALARD de Marquaix

Né le 7 juin 1892, Eugène LAVALARD a vu le jour à Marquaix, dans l’Est du département de la Somme. Il n’y a guère plus de 350 habitants dans ce petit village situé dans le canton de Roisel. L’activité est, comme dans la plupart des villages du secteur, essentiellement tournée vers l’agriculture. Des cultivateurs, des ouvriers agricoles ou domestiques de ferme, et quelques professions directement liées au domaine comme charron ou maréchal-ferrant. Il reste également quelques ateliers de tissage dans le village, et au moins trois marchands de chiffons. Les commerces sont rares. Un café et une boulangerie, tenu par la famille François, et c’est tout !

Marquaix, situé sur la voie de chemin de fer entre Saint-Just-en-Chaussée et Douai a la chance d’avoir une halte. Il ne s’agit pas d’une gare, mais d’un arrêt situé devant la maison du garde-barrière, Théodore TROCME.

A Marquaix, plus d’un tiers de la population habite le hameau de Hamelet. C’est dans ce hameau qu’habitent les parents d’Eugène LAVALARD, Henri et Elvire. Suite à une histoire d’amour, le petit gars du Pas-de-Calais est venu épouser une fille de la Somme, à Marquaix et il y est resté. Eugène est donc né à Marquaix, ou plus exactement, à Hamelet – commune de Marquaix !

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Henri, le père d’Eugène, est berger pour un fermier de Hamelet, Fernand MUSEUX.  Elvire et sa mère, Olympe, travaillent également chez les MUSEUX.

Quand il a quitté les bancs de l’école de Monsieur MERLIER, l’instituteur, Eugène travaille aussi pour les fermiers de Hamelet. De toute façon, dans des villages comme Marquaix ou Hamelet, quand on n’a pas de ferme à soi, on travaille pour les autres fermiers. Aucune autre alternative ne se présente.

Gustave DUPUIS, un copain d’Eugène qui réside, comme lui, dans la rue de Roisel à Hamelet, est issu d’une famille similaire à celle des LAVALARD. Chez les DUPUIS, la mère et les trois sœurs aînées travaillent dans différentes fermes. Gustave aussi, bien sûr. Gustave a perdu son père et il est donc le seul homme de la famille. Eugène, lui, est enfant unique.

Les deux copains passent ensemble devant le Conseil de Révision. Quelle chance ! Ils sont affectés, l’un et l’autre, au 120e Régiment d’Infanterie de Péronne. La sous-préfecture de la Somme n’est située qu’à une petite dizaine de kilomètres de Hamelet. Ils sont persuadés qu’ils pourront revenir souvent, en permission, et participer aux moissons de l’été 1914. Malheureusement pour eux, quand ils sont incorporés au 120e RI, le 9 octobre 1913, le régiment a déjà quitté la caserne Foy de Péronne. Un transfert vers la Meuse, pour préparer l’éventuelle entrée en guerre de la France, a été décidé pour le 120e et plusieurs régiments de la région. Eugène et Gustave prennent le train à la halte de Marquaix pour rejoindre la gare d’Amiens, puis celle de Paris, où une correspondance pour Stenay, dans la Meuse, les attendra en Gare de l’Est.

Le 1er août 1914, quand le garde-champêtre de Marquaix, passe dans toutes les rues pour crier la nouvelle de la mobilisation générale, Eugène et Gustave sont déjà loin. Si loin de Marquaix, mais si proches de la guerre.

Le 120e Régiment d’Infanterie participe à la grande offensive du 22 août, en Belgique, avec pour objectif de repousser les Allemands du territoire belge. Les hommes du 120e s’attendent à avoir un combat à livrer après la rivière Semois, 20 km après la frontière, et, malgré les sacs à dos de 30kg, ils s’avancent dans la plaine du village de Bellefontaine à une allure leur permettant de franchir le pont sur la rivière en fin de matinée. Hélas, dès les premières centaines de mètres parcourues dans la plaine du Radan, ils sont cueillis à froid par les mitrailleuses allemandes cachées en lisière des bois.

Les deux copains sont fauchés par les balles ennemies.  Eugène LAVALARD est blessé au bras gauche. Gustave DUPUIS ne se relève pas. Il sera inhumé, le lendemain, dans une fosse commune du village.

Eugène est évacué vers la France pour y être soigné. Quand il est à nouveau jugé apte à combattre, la guerre a changé de forme. D’une guerre de mouvement, elle est devenue une guerre de position. C’est donc dans les tranchées de la Meuse qu’Eugène fait son retour au front, le 16 décembre 1914. Moins de trois mois plus tard, il est encore blessé. Un éclat d’obus lui a déchiré la fesse gauche.

A son retour de convalescence, en août 1915, Eugène LAVALARD est affecté au 72e Régiment d’Infanterie. Il quitte le 120e. Combien d’hommes, incorporés pour le service militaire au 120e, en octobre 1913, sont-ils encore aptes au combat, une seule année après la déclaration de guerre ? Eugène quitte le 120e mais il a la chance d’être encore vivant. Son copain Gustave, de Hamelet, n’a pas eu cette chance…

Eugène est un bon soldat. Il est cité plusieurs fois à l’ordre du régiment pour sa bravoure, son entrain et son dévouement ». Il est d’ailleurs promu caporal en juin 1918. Après l’Armistice, il n’est pas obligé de partir en Allemagne pour assurer le maintien de l’ordre. Il est mis à la disposition des Chemins de fer du Nord. Il y restera ensuite comme mécanicien et partira à Beaumont-sur-Oise.

Marquaix et son hameau d’Hamelet ont été détruits pendant la guerre. Les parents  Lavalard ne sont pas revenus y vivre.

Angelina, la mère de Gustave DUPUIS, a souhaité poursuivre sa vie à Hamelet. Habitation provisoire, puis, une vraie maison en briques, la vie reprend pour elle… si on peut dire. Son seul fils ne reviendra plus jamais. Angelina vit avec Claire et Jeanne, les sœurs de Gustave. Et toutes les trois travaillent pour les fermiers de Hamelet.

Même si les fermiers sont beaucoup moins nombreux qu’avant, en cette période de reconstruction, il reste toujours du travail pour les domestiques agricoles, à Hamelet, à Marquaix, et dans tous les nombreux villages détruits de la Somme.

Eugène LAVALARD a choisi une autre vie.

Lionel JOLY et Xavier BECQUET

« De la Somme à Bellefontaine – 22 août 1914 » – recherche collaborative 1891, 1892, 1893 – Département Somme.  Francis et Brigitte DANEZ ont réalisé la collecte de données pour la commune de Marquaix.

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