Né le 8 décembre 1891, Edouard BRUSQUE est un enfant de la mer.
Son père, prénommé également Edouard, est marin. Quand le jeune Edouard vient au monde, la famille BRUSQUE réside Quai Violette à Saint-Valery-sur-Somme.
Edouard « père » est issu d’une famille de marins de Saint-Valery. Louise, la maman, est la fille du cantonnier du village voisin de Boismont.
Edouard « fils » est le seul garçon de la fratrie. Il naît après Marie, l’aînée de la fratrie et avant Edouard, Juliette et Germaine.

La commune compte plus de 3 500 habitants à la fin du XIXe siècle. Grace à son activité portuaire, Saint-Valery est un centre économique important dans l’Ouest du département de la Somme. La pêche en mer est une activité qui permet à de nombreuses familles valéricaines de vivre. Il y a aussi le port de commerce. Les marchandises débarquées sur place sont acheminées ensuite par train sur la voie de chemin de fer économique qui relie Noyelles à Cayeux-sur-Mer, vers les grandes villes de la région et vers Paris.
Le commerce et l’artisanat sont très développés dans ce chef-lieu de canton. Les marchés hebdomadaires attirent les habitants des communes voisines.

L’enfant qu’est Edouard BRUSQUE accompagne son père en mer dès le plus jeune âge. L’école devient alors souvent secondaire. La famille vit au rythme des marées, plutôt qu’à celui des horaires scolaires. Edouard est le seul garçon de la fratrie donc l’avenir semble déjà tracé pour lui. Il sera marin. Comme son père.

A Saint-Valery, les jeunes hommes du même âge sont nombreux. Quand vient l’heure du service militaire, chacun espère pouvoir être affecté avec ses meilleurs copains. En 1912, Edouard BRUSQUE est jugé apte au service armé par le Conseil de Révision. Il est affecté au 120e Régiment d’Infanterie de Péronne comme Charles CAILLOUIN. Ce n’est pas forcément lui qu’il aurait choisi comme copain de régiment, mais il l’apprécie et va avoir beaucoup de temps pour apprendre à mieux le connaître. Ils vont partager deux années de leur jeunesse, dans l’Est du département de la Somme.
Charles CAILLOUIN vit chez son oncle et sa tante, Place de l’Amiral Courbet. L’oncle est tailleur d’habits et Charles est son apprenti.

Le 9 octobre 1912, le train emporte Edouard BRUSQUE et Charles CAILLOUIN de la gare de Saint-Valéry vers celle de Noyelles-sur-Mer, où ils trouvent un train de correspondance pour rejoindre le chef-lieu d’arrondissement de l’Est du département de la Somme qu’est Péronne.
La caserne Foy résonne de l’accent picard dans toute sa diversité territoriale. Edouard et Charles retrouvent de nombreux copains de Saint-Valery ou des villages avoisinants comme Boismont, Pendé, Estreboeuf, Cayeux. Le 120e de Péronne regroupe des jeunes hommes venus de toute la Somme, du Ponthieu au Santerre, en passant par le Vimeu et l’Amiénois. Même s’il leur tarde de revoir la mer et la Baie de Somme, Edouard et Charles envisagent plutôt bien les quelques mois d’instruction militaire qu’ils vont devoir subir. Le 120e RI fait partie de l’univers des Péronnais. Manœuvres dans les champs et bois jouxtant la ville, défilés officiels sur la Grand Place, mais aussi moments de détente dans les bistrots de la ville favorisent le rapprochement entre les habitants et les trouffions du 120e.

Un an plus tard, début octobre 1913, une nouvelle classe doit venir compléter les effectifs et remplacer ceux qui terminent leur deuxième année. Mais, en réalité, malgré l’arrivée des « bleus », personne ne quitte la caserne. Une nouvelle loi française vient d’allonger la durée du service militaire de deux à trois ans.
Le 9 octobre 1913, le 120e RI quitte Péronne pour partir caserner dans le département de la Meuse, à Stenay. Il est un des seuls régiments d’Infanterie de la Région militaire d’Amiens envoyés près des frontières de l’Est pour en assurer la sécurité. Les nouveaux arrivants n’ont pas le temps de découvrir Péronne. C’est dans la caserne Chanzy de Stenay qu’ils vont poser leur sac.

Plusieurs Valéricains sont du voyage. Louis DUQUENNE, Théodule CARPENTIER et Charles GODIN.
Louis DUQUENNE habite Rue Gauthier. Il est manouvrier et travaille parfois avec son père comme ferblantier. Théodule CARPENTIER aussi est manouvrier. Théodule et son frère Edouard sont restés dans la petite maison de la Rue de Neuville avec leur mère devenue veuve. Tous les travaux sont bons à prendre, et dans la cité portuaire, il n’en manque pas. Charles GODIN habite avec ses frères et sœurs chez son beau-père, Rue de la Ferté. Le beau-père est cordonnier. Charles, lui, est apprenti vernisseur.

Quelques jours après son arrivée à Stenay, Charles GODIN est muté au 69e Régiment d’Infanterie de Nancy. C’est un réel déchirement de laisser les copains de la Somme. Contrairement au 120e RI qui est positionné pour défendre la frontière belge en cas d’invasion, c’est celle de l’Alsace-Moselle allemande que le 69e doit protéger.
A Stenay, les hommes du 120e poursuivent leur instruction militaire, en alternant les lieux de manœuvre. A plusieurs reprises, ils se rendent à Sissonne, dans l’Aisne.
Quand la guerre est déclarée par l’Allemagne, le 3 août 1914, les régiments de l’Armée Active sont prêts. La mobilisation générale est destinée à rappeler tout d’abord ceux qui ont été formés depuis peu et plus le mois d’août avance, plus l’âge des nouveaux mobilisés augmente.
Le 22 août, la 87e Brigade d’Infanterie française affronte la 21e Brigade d’Infanterie allemande sur le territoire de la commune belge de Bellefontaine. La 87e Brigade est dirigée par le général Cordonnier. Elle est composée du 120e RI, de batteries d’artillerie du 42e RA et des deux régiments de chasseurs à pied, le 9e et le 18e BCP.
Louis DUQUENNE est tué, avec plusieurs centaines de jeunes hommes du 120e RI. Théodule CARPENTIER, considéré tout d’abord comme disparu, a finalement échappé à la mort, comme Edouard BRUSQUE et Charles CAILLOUIN.
Quelques jours plus tard, le 120e RI livre un nouveau terrible combat dans la Marne, avant qu’au début de l’automne, la guerre de tranchées ne s’installe. Pour les hommes du 120e, c’est le Bois de la Gruerie, en Argonne, qui devient leur univers.
C’est dans ce bois que Théodule CARPENTIER est blessé à la main gauche le 1er novembre 1914.

C’est dans ce même bois que, trois jours plus tard, Edouard BRUSQUE est évacué pour une grave blessure provoquée par des éclats de bombe. Il perd l’usage de ses deux yeux.
Charles CALLOUIN, après l’Argonne, connaît le bourbier de Verdun. Promu caporal le 16 avril 1915 pour s’être particulièrement distingué au combat, il est tué moins de quinze jour plus tard. Personne ne sait d’ailleurs exactement quand il est mort. Décès situé « entre le 25 avril et le 3 mai ».
Aucun des quatre copains de Saint-Valery-sur-Somme ne continuera la guerre.

Edouard BRUSQUE est réformé définitivement le 22 mai 1915 pour cataracte traumatique des deux yeux. Une gratification de 750 francs lui est versée en août 1918.
Théodule CARPENTIER ne retrouve pas l’usage de son bras gauche. Après cinq mois d’hospitalisation et deux mois de convalescence, il est finalement affecté au dépôt du 120e RI à Ancenis, en mai 1915. Lui non plus ne retournera jamais au front. Il ne quittera plus jamais cette région, même après la guerre.
En 1915, personne ne sait ce qu’est devenu leur copain Charles GODIN, parti du 120e tout de suite après y être arrivé. Sa famille l’espère prisonnier des Allemands. Il faudra attendre le printemps 1920 pour que l’information officielle de sa mort parvienne à Saint-Valery. Mort qui remonte au 1er septembre 1914, quelques jours après la disparition de Louis DUQUENNE.

Malgré son handicap, Edouard BRUSQUE est redevenu marin après la guerre. Il a eu plusieurs filles, dont la première est née en 1916 et un garçon prénommé Lucien né en 1919. Lucien est devenu marin, comme son père.
Edouard BRUSQUE est mort à Saint-Valery-sur-Somme le 8 décembre 1947.
Lionel JOLY et Xavier BECQUET
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