ILS AVAIENT 20 ANS EN 1914 – André VIMEUX d’Ablaincourt-Pressoir

Né le 5 juin 1891, André VIMEUX, est le fils d’Orphis VIMEUX et de Victoria DUQUENNE.  Les parents sont originaires du village d’Ablaincourt, dans l’Est de la Somme. Ils sont ouvriers agricoles. Le père a pour prénoms Louis et Joseph, mais tout le monde l’appelle Orphis.

Après la naissance de Louise et de Palmyre, le couple déménage et vient s’installer à Pressoir. Le village voisin. Ils habitent Rue d’Hyencourt-le-Grand. C’est dans cette maison que vient au monde André, suivi par Abel et Charlotte.

Dans la Rue de Hyencourt-le-Grand, à part des fermes, il n’y a que l’épicerie-café d’Hosias Bruhier. André a plusieurs copains de son âge dans la rue. Dans la ferme des Debras, il y a Joseph LESAGE, né à Sancourt, employé comme domestique de ferme. Dans la ferme des FRANCOIS, le fils, Moïse, est également un copain.

Dans ce village de 89 habitants avant 1914, les commerces sont peu nombreux. A part l’épicerie des Bruhier, on trouve juste une boutique de bonneterie et un autre café, dans la Rue de Chaulnes, chez Victorine, dont le petit-fils, Marcel HELEINE, est aussi copain d’André.  Autant dire que, dès qu’on veut acheter quelque chose qui sort de l’ordinaire, il faut aller à Chaulnes. A Ablaincourt, le village voisin, comme dans les hameaux de Bovent et de Gomiécourt, il n’y a que des fermes. Toute l’activité tourne autour de la culture. Céréales et betterave sucrière constituent le seul univers des habitants de ce territoire du plateau du Santerre.

C’est à Chaulnes qu’André est convoqué pour le Conseil de Révision. Son copain, Moïse FRANCOIS y est allé l’an dernier. Il a été réformé pour obésité. Il n’effectuera pas son service militaire. Des copains de Pressoir, c’est le 2e qui a été réformé.

L’autre, c’est Marcel HELEINE, le petit-fils des cafetiers de Pressoir. Il souffre d’une maladie héréditaire, la syphilis. L’armée l’a réformé pour « perte de luette et d’une partie du voile du palais ».

André, lui, est en bonne santé. Il est jugé apte par le Conseil de Révision et  doit partir le 9 octobre 1912. André n’a toutefois pas de chance, car, contrairement à son copain, Joseph LESAGE, il va devoir quitter la Somme. Beaucoup de jeunes hommes du secteur sont affectés au 120e de Péronne, au 87e de Saint-Quentin ou au 72 RI d’Amiens, comme l’est Joseph. André, lui, est incorporé au 154e Régiment d’Infanterie. Les retours en permission à la maison seront rares. Le 154e est caserné à Lérouville, au Nord-Ouest de Commercy, dans la Meuse.  Bien loin de la Somme !

Le 154e RI est composé  de soldats du Nord, de la Meuse,  de Normandie et de Paris. André y retrouve peu de Picards. Même s’il apprécie la beauté des paysages vallonnés de la Meuse, le plat pays du Santerre lui manque. Il en vient à regretter les champs de céréales et de betteraves de Pressoir.

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Alors que la guerre est imminente, le 154e RI prendre position, le 31 juillet 1914, dans la Woëvre, entre les côtes de Meuse et de Moselle. Les soldats doivent organiser des positions et des obstacles dans l’éventualité d’une invasion soudaine des Allemands. La guerre est déclarée le 3 août, mais l’offensive allemande n’est plus attendue par la frontière de l’Alsace-Moselle. L’Armée allemande s’apprête à traverser la Belgique et le Luxembourg avant d’entrer sur le territoire français.

Le 154e RI progresse alors vers le Nord du département de la Meuse pour se retrouver, le 21 août, au niveau de Dommary-Baroncourt, tard dans la nuit. La présence de chevaux morts prouve que l’ennemi est déjà passé par là. Le 22 au matin, le régiment doit se porter sur Fillières, à quelques kilomètres du Luxembourg. La mission est d’arrêter tout ennemi débouchant de la direction Fontoy-Thionville. Il fait chaud. A la sortie de Joppécourt, des hommes du 154e tirent sur une patrouille allemande. Ce sont les premières balles tirées contre l’ennemi au sein du régiment. Cette patrouille annonce en réalité l’arrivée de troupes beaucoup plus importantes. Les hommes du 154e voient leur colonel se porter en avant à cheval vers l’ennemi, et revenir rapidement après avoir essuyé une grêle de balles. Le village de Fillières, où les Français se sont réfugiés, est bientôt encerclé par les troupes et l’artillerie allemande. Le 2e bataillon du 154e RI est particulièrement touché. Il perd tous ses officiers et 50% de son effectif. Le régiment reçoit l’ordre de tenir le village, coûte que coûte, au prix de plusieurs centaines de vies. Alors que le village est en feu, l’état-major accepte enfin que les hommes battent en retraite, le 22 au soir.

André VIMEUX est porté disparu. Son corps, retrouvé après la bataille, est inhumé sur place.

Son copain Joseph Lesage, incorporé au 72e RI d’Amiens, est fait prisonnier quelques jours plus tard, début septembre 1914. Il est interné en Allemagne au camp de Minden, et n’est rapatrié qu’en 1919.

Moïse FRANCOIS et Marcel HELEINE, les 2 copains réformés, sont restés au village. Quand les Allemands l’ont occupé, dès la fin septembre 1914, ils ont été également emmenés en captivité. Moïse a été libéré après l’Armistice. Marcel, lui, n’est jamais revenu. Il est mort à Wittenberg, de sa maladie, le 4 juillet 1915.

Pressoir et le village voisin d’Ablaincourt ont été complètement détruits pendant la guerre. Les hameaux de Bovent et de Gomiécourt ne seront jamais reconstruits.

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Seuls les FRANCOIS sont revenus à Pressoir. Moïse, aidé par ses deux frères, Léonce et Georges, a reconstruit la ferme et repris l’exploitation. Il s’est marié et a eu une fille, prénommée Raymonde. Peu d’anciennes familles de Pressoir sont revenues après la guerre. D’anciennes fermes ont été reconstruites et exploitées par quelques familles polonaises.

Les VIMEUX ont tout perdu. Leur fils aîné, mort dès le début de la guerre, et leur maison, détruite en 1917 par les Allemands.

Non, ils n’ont pas tout perdu. Abel, le frère cadet d’André a survécu. Né en 1895, il aurait dû être mobilisé en 1915 et qui sait ce qu’aurait été son parcours si l’incorporation avait pu être effectuée. Mais en 1915, Abel était prisonnier en Allemagne, comme l’étaient tous les hommes en âge de se battre, restés dans  la zone de l’Est du département de la Somme, occupée par l’ennemi de septembre 1914 à mars 1917. Abel a pu revenir en France après l’Armistice.

Comme ses parents, Abel n’est jamais revenu vivre à Pressoir.

Lionel JOLY et Xavier BECQUET

« De la Somme à Bellefontaine – 22 août 1914 » – recherche collaborative 1891, 1892, 1893 – Département Somme.  André MELET a réalisé la collecte de données pour la commune d’ Ablaincourt-Pressoir.

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