Né le 28 août 1893, Fernand HAREUX a perdu son père alors qu’il n’était qu’un enfant.
Victimes de la Première Guerre mondiale – une Somme de vies brisées par 14 18.
Emile HAREUX avait épousé Malvina Monvoisin à Herleville, village d’origine de l’épouse. C’est dans ce village que le couple s’est installé et où Fernand est né.
Avec la disparition prématurée d’Emile, il n’y aura pas d’autre enfant. Emile est le fils unique.
Quelques années plus tard, Malvina se remarie avec Maxime Fourmaux. Ils ont ensemble une fille, prénommée Denise, de dix ans la cadette de Fernand. Puis Maxime meurt à son tour alors que Fernand n’est qu’adolescent. La vie familiale du jeune Fernand HAREUX est donc pour le moins compliquée.
Pour aider sa mère, Fernand a travaillé très tôt pour les fermiers d’Herleville, délaissant les bancs de l’école de Monsieur Coquelle. Il ne sait pas vraiment lire, mais, à Herleville, ce n’est pas un problème en ce début de XXe siècle. Les bras comptent plus que la tête.
Dans le petit territoire de la commune, la seule activité est l’agriculture. Plus de 550 des 600 hectares du territoire communal sont des terres labourables. On y cultive essentiellement céréales et betteraves à sucre, avec des rendements importants liés à la richesse des bonnes terres du Santerre, mais aussi à l’utilisation d’engrais chimiques. Dans le village d’un peu plus de 300 habitants, il y a 40 fermes, dont la moitié, il est vrai, possèdent moins de 5 hectares de terres.

Hormis les vaches pour le lait, le seul élevage est celui de moutons, dont la laine est utilisée par quelques ouvriers tisseurs pendant les jours d’hiver.
Herleville est un village agricole du canton de Chaulnes, dans l’Est du département de la Somme, un peu isolé de tout. Même si la route nationale Amiens-Péronne passe à un kilomètre des habitations, le village n’est relié aux autres communes du secteur que par des chemins, pas toujours bien entretenus, dont certains sont difficilement praticables en période de pluie. A Herleville, une carrière de craie est exploitée presque uniquement pour l’entretien de ces chemins d’exploitation rurale. La gare la plus proche est à Rosières, à 5 km. Le village a encore un moulin à vent, ce qui permet aux habitants de disposer de farine et de faire leur pain.
Quand on habite à Herleville, à cette époque-ci, on en quitte rarement le territoire. Pourquoi en partir alors qu’il y a une école, un curé – l’abbé Choquet qui vit avec Blanche, sa bonne, le café-épicerie de Zéphirin Harlé où on arrive à trouver un peu de tout, et suffisamment de riches terres agricoles pour faire vivre la population locale ?
Fernand HAREUX est domestique de culture ou garçon de cour. Il met ses bras à disposition des fermiers en contrepartie d’un petit salaire.
A 20 ans, Fernand quitte son village pour passer devant le Conseil de Révision à Chaulnes. Il est affecté au 120e Régiment d’infanterie de Péronne. Pour ce jeune ouvrier agricole, si Péronne était déjà l’inconnu, une autre destination bien plus lointaine l’attend. Il part le 27 novembre 1913, comme des centaines d’autres jeunes hommes de la Somme, pour rejoindre le 120e RI, caserné maintenant à Stenay, dans la Meuse.

Sur le quai de la gare de Rosières, Fernand retrouve Marcel HEROT et Alcide PECHON, de la commune, qui partent, comme lui, pour Stenay.
Trois jeunes hommes aux destins très différents que seul le service militaire peut rapprocher. Marcel HEROT est étudiant à Amiens, Alcide PECHON est ouvrier tricotier à l’usine de Rosières, et Fernand HAREUX est domestique de ferme à Herleville.
Quand la guerre est déclarée, début août 1914, et même si l’instruction militaire n’a duré que 9 mois, alors qu’elle devait durer trois ans, les hommes qui effectuent leur service militaire au 120e sont déclarés immédiatement prêts au combat. Le 120e RI sera un des régiments en première ligne quand la grande offensive du 22 août 1914 sera lancée sur ordre du Général Joffre. Repousser les Allemands et leur faire quitter la Belgique ! Les renvoyer à Berlin, peut-on même entendre fréquemment dans les discours des officiers !
Si le 22 août est une des journées les plus sanglantes de l’histoire de l’Armée française, avec ces 25 000 morts, elle est assurément la journée la plus meurtrière pour le 120e RI. En quelques heures, les pertes s’élèvent à 1 000 hommes, dont plus de 400 ne se relèveront jamais.
Fernand HAREUX, le jeune homme d’Herleville, aux cheveux châtains et aux yeux bleus, est au nombre des morts. Ce n’est pas dans la riche terre du Santerre que son corps reposera à tout jamais, mais dans la plaine nommée Radan, du petit village belge de Bellefontaine.

Ayant dû quitter leur village, occupé par les Allemands dès la fin septembre 1914, Malvina, sa maman et Denise, sa demi-sœur, devront attendre longtemps l’annonce de la mort de leur cher Fernand. Après avoir été déclaré disparu « antérieurement au 15 juillet 1915 », ce n’est qu’en avril 1919 que le tribunal de première instance de Péronne déclare Fernand HAREUX, mort le 22 août 1914 à Bellefontaine, à l’âge de 21 ans.
Alcide PECHON, le tricotier de Rosières, a survécu à Bellefontaine et à la Bataille de la Marne, mais il est mort, quelques semaines plus tard, au Bois de la Gruerie, à l’âge de 21 ans.
Marcel HEROT, l’étudiant, est revenu vivant. Promu caporal, puis sergent, il a été fait prisonnier le 12 avril 1915 à Maizeray, dans la Meuse. C’est au camp de Würsburg, puis dans celui de Lechfed, en Allemagne, qu’il a vécu la captivité jusqu’au 20 décembre 1918. Après la guerre, il a fait une brillante carrière professionnelle, à Nancy et à Lille, exerçant de hautes responsabilités à la Sécurité Sociale. Marcel HEROT est mort en 1980, à l’âge de 86 ans.
Fernand HAREUX repose au cimetière du Radan, à Bellefontaine, comme 51 jeunes de la Somme tués également le 22 août 1914, dont les corps ont pu être identifiés. 52 jeunes qui avaient entre 20 et 23 ans.
L.J et X.B.
« De la Somme à Bellefontaine – 22 août 1914 » – recherche collaborative 1891, 1892, 1893 – Département Somme. Marie-Hélène CABOT a réalisé la collecte de données pour la commune d’ Herleville.


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