Victimes de la Première Guerre mondiale – une Somme de vies brisées par 14 18.
Né le 12 août 1892, Jules BOUBERT est le fils de Claude BOUBERT et de Victoire Eugénie BULTEL.
Le père est originaire de Pendé, commune de naissance de Jules, et la mère, de Lanchères, le village voisin. Ils sont cultivateurs, comme l’étaient leurs parents, dans ce petit coin du Vimeu maritime, situé à quelques kilomètres de Saint-Valery-sur-Somme.
Pendé est une petite ville qui compte plus de 1 300 habitants, en cette fin du XIXe siècle. L’agriculture et la serrurerie sont les activités principales. Beaucoup sont même agriculteurs à la belle saison, et serrurier à domicile, l’hiver. La sucrerie de Lanchères est un employeur important, notamment quand la saison de la betterave à sucre bat son plein. Le chemin de fer économique entre Noyelles et Cayeux-sur-Mer a besoin aussi de bras, notamment de cantonniers, pour entretenir les voies.
Jules est le dernier enfant de la fratrie. Son frère aîné, Emile, est né en 1888. Puis ont suivi Marie et Eugénie, avant l’arrivée de Jules en été 1892.
Très jeunes, les enfants aident les parents dans l’exploitation de la ferme, à Grand Pendé. Et quand le père, Claude, décède brutalement, les quatre enfants ne sont encore que de jeunes adolescents. Leur avenir professionnel semble maintenant sans équivoque. Emile et Jules seront fermiers, eux aussi.
Pendant qu’Emile va effectuer ses deux années de service militaire, au 29e Régiment d’Artillerie de Laon, Jules assure, avec sa mère, la direction de la ferme.
Et quand Jules part, le 9 octobre 1913, Emile sait qu’il va devoir, à son tour, veiller à ce que tout se passe bien. Le service militaire, suite à la Loi Barthou, vient de passer de deux à trois ans, mais qu’importe, quand Jules reviendra, les deux frères pourront, ensemble, travailler dans la ferme familiale.
Jules est incorporé au 120e Régiment d’Infanterie de Péronne. Il prend le train, en gare de Lanchères, avec son copain Arthur BLONDIN. Ils ont la chance d’être affectés dans le même régiment, et même si le 120e a quitté la caserne Foy de Péronne pour celle de Chanzy à Stenay, dans la Meuse, le fait d’être à deux du même village est rassurant. Ils vont pouvoir retrouver trois autres copains d’école de Pendé, déjà au service militaire depuis un an, au 120e. Il y a Joachim MALOT et Maximilien OUIN. Une bande de 4 copains du même village, bloqués pendant un bout de temps encore, dans une petite ville de garnison du Nord de la Meuse.
Quand la guerre est déclarée, le 3 août 1914, les soldats ont déjà été préparés, depuis plusieurs jours, à l’imminence des combats à mener, contre les Allemands, à proximité de la frontière belge. Le général Joffre, n’attend pas que les troupes allemandes franchissent massivement la frontière française. Il préfère lancer une grande offensive sur le sol de la Belgique alliée, pour repousser les Allemands et les renvoyer « à Berlin ».
Le 22 août à 5h du matin, les 5 copains de Pendé quittent leur lieu sommaire de repos, à Meix-devant-Virton, en Belgique, et se mettent en marche, un sac de 30kg sur le dos, et l’arme à l’épaule, pour atteindre le plateau de Bellefontaine. Le petit chemin forestier est encore boueux suite aux orages de la veille, et le brouillard est à couper au couteau. Certains parlent et plaisantent pour donner l’impression que rien de grave ne peut arriver, mais nombreux sont ceux que l’angoisse rend complètement silencieux. En traversant le petit village de Lahage, la population locale leur donne un peu de nourriture et de boisson. Le combat paraît, de toute façon, inévitable, mais ce moment de fraternité entre civils belges et militaires français apporte du baume au cœur.
Arrivés sur le plateau de Bellefontaine, les commandants des 3 bataillons reçoivent l’ordre de s’engager, pour deux d’entre eux, dans la grande plaine du Radan, et pour l’autre, de se diriger vers le village de Bellefontaine. Il est 7h30. Mais personne ne sait alors que cette plaine sera la destination finale pour plusieurs centaines de jeunes hommes du régiment.
Jules BOUBERT et Arthur BLONDIN, partis le même jour au service militaire, meurent le même jour, ici, dans la plaine du Radan, tués par les mitrailleuses allemandes cachées en lisière de bois.
Jules vient d’avoir 22 ans et Arthur en a 21.
Les deux autres copains de Pendé ne sont pas blessés, mais l’horreur et les traumatismes psychologiques ont bien débuté pour eux. Contrairement aux jeux d’enfants, ceux qui ont été tués ne se relèvent pas. Leurs copains, Jules et Arthur, ne reviendront jamais à Pendé. Ils ne peuvent s’empêcher de visualiser leurs parents, et se poser la question « Mon tour, c’est pour quand ? ».
Maximilien OUIN meurt au Bois de la Gruerie, en Argonne, où combat le 120e après la Bataille de la Marne de début septembre. Maximilien est considéré comme disparu le 15 septembre. En trois mois, 3 des 4 copains de Pendé, affectés pour leur service militaire au 120e RI, sont morts.
Joachim MALOT disparaît, au Bois de la Caillette, le 16 avril 1916. Le 4e copain est disparu lui aussi… Mais heureusement, la disparition annoncée par l’état-major français, n’est pas une mort. Joachim est fait prisonnier et emmené en captivité en Allemagne. Il n’est rapatrié que le 21 décembre 1918. Mais il est vivant, contrairement à ses trois copains d’enfance.
Emile, le frère de Jules BOUBERT, a été mobilisé le 6 août 1914, comme canonnier-conducteur, au 29e Régiment d’Artillerie. Promu en 1917 pour son « calme et son courage parfait », Emile Boubert a été démobilisé en mars 1919. Le 22 août 1914, quand son frère a été tué, le 29e RA était à Sommethonne, en Belgique, à moins de dix kilomètres de Bellefontaine, là où Jules a fermé définitivement les yeux. Il ne l’a su que bien plus tard, car l’annonce officielle de la date et du lieu de mort de Jules, n’est parvenue dans le village qu’après la fin de la guerre. Emile BOUBERT est revenu à Pendé, dans la ferme familiale, et y a fondé une famille avec Elizabeth, une jeune fille de Franleu. Victoire Eugénie, la mère de Jules et d’Emile, est restée, dans la ferme. Le premier enfant d’Emile et d’Elizabeth est une fille, prénommée Marcelle. Et tout naturellement, quand le premier garçon est arrivé, en 1923, il a reçu le prénom de Jules, en hommage à cet oncle disparu beaucoup trop tôt.
Sur le monument aux morts de Pendé, les noms d’Arthur BLONDIN et de Jules BOUBERT sont les premiers de la liste. Les deux premiers morts du village, tués seulement 19 jours après le début de la guerre.
L.J. et X.B.
« De la Somme à Bellefontaine – 22 août 1914 » – recherche collaborative 1891, 1892, 1893 – Département Somme. AJean-Claude MAISON a réalisé la collecte de données pour la commune de Pendé.
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