UN JOUR, UN PARCOURS – Raoul BONNEVAL, de Sorel-en-Vimeu

Victimes de la Première Guerre mondiale – une Somme de vies brisées par 14 18.

Né le 2 juillet 1893, Raoul BONNEVAL était appelé à devenir fermier à Sorel-en-Vimeu. Fils unique d’un couple de fermiers, son avenir était tracé.

Sorel-en-Vimeu est un petit village agricole du canton d’Hallencourt, dans la Somme, comptant à peine 200 habitants en cette fin de XIXe siècle.

Dans un village de cette taille, les copains ça compte. Les garçons du village qui ont presque le même âge que Raoul sont 4 et seulement 4. Pas un de plus !

Il y a Paul ROLLE, le fils du cantonnier ; Louis BERTOUX, le fils du menuisier ; Fernand SINOQUET, dont la mère tient la ferme depuis que son mari est mort, et Louis DELBARRE, le fils du berger.

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Bien sûr, du même âge, il y a quelques filles aussi dans le village, comme Madeleine, la sœur de Louis BERTOUX, ou comme Marie-Louise, la fille du maréchal-ferrant, mais ce n’est pas pareil.

La bande des 5 copains est, naturellement inséparable.

Les parents de Raoul BONNEVAL sont cultivateurs, Rue de l’Eglise. Alphonse, le père, est originaire du village, et Marie, la mère, du hameau de Bellifontaine, près de Bailleul, à six kilomètres de Sorel.

Raoul n’aura jamais d’autres frères et soeurs. Il passe sa jeunesse  à la ferme, avec ses parents et son grand-père, Eusèbe. Dans le village, les seuls autres BONNEVAL font partie de la famille de Léonidas, le cantonnier.

Comme la ferme est grande, l’aide de Raoul ne suffit pas. Plusieurs jeunes « étrangers » à la commune sont employés comme ouvriers agricoles, bénéficiant du gîte et du couvert. Il y a Numa, qui vient d’Amiens ; Pierre, un enfant de l’assistance publique, et René, un jeune d’Abbeville. Dès qu’ils ont une dizaine d’années, les enfants peuvent être d’une aide appréciable pour les fermiers.

Si la guerre arrive un jour, comme l’envisagent certains journaux au début du XXe siècle, les 5 copains n’imaginent même pas qu’il leur soit possible de ne pas aller chasser les Prussiens ensemble !

Raoul BONNEVAL ne débute pas la guerre, contrairement à ses quatre copains. Quand il est envoyé au front, le 10 décembre 1914, il rejoint le 128e Régiment d’Infanterie, déjà décimé par les combats des premiers mois. Il arrive dans un des plus terribles bourbiers possibles, le Bois de la Gruerie, en Argonne. Même s’il savait que ça ne serait pas de l’amusement, Raoul a été heureux d’apprendre son affectation au 128e d’Abbeville. Il a tout de suite pensé qu’il allait y retrouver Fernand SINOQUET, l’autre fils de fermier de la bande des 5 copains de Sorel. Le 11 décembre, lendemain de son arrivée, Raoul voit tomber son copain, mortellement touché par une balle ennemie. Ainsi commence la guerre de Raoul BONNEVAL.

Le 6 mars 1915, dans la Marne, Raoul est blessé d’une balle dans le bras gauche. Nommé caporal, il revient après deux mois de soins et de repos. Le 18 juillet 1915, il est à nouveau blessé. Dans les Hauts de Meuse, une balle atteint le cuir chevelu. La mort est encore passée tout près.  Après quelques semaines d’arrêt, il doit repartir, avec la peur que la prochaine balle, cette fois-ci, ne touche pas que le cuir chevelu !

Les combats continuent. L’Argonne, la Marne, Verdun, la Somme… Tous plus meurtriers les uns que les autres. Raoul est un bon sous-officier. Le 10 octobre 1916, il est nommé sergent-fourrier.

Blessé au Chemin des Dames, en mai 1917, il reçoit la citation suivante : ‘’Pendant les combats des 5.6.7 mai 1917, a rempli sa mission d’agent de liaison avec un grand courage et un mépris absolu du danger dans une tranchée constamment battue par  des feux violents d’artillerie et de mitrailleuses ennemies, sous-officier d’un dévouement et d’un courage sans limite.’’

La hiérarchie militaire lui propose alors de devenir officier. Appelé à l’Ecole militaire de Saint-Cyr pour des cours d’élèves officiers, il en sort le 25 décembre 1917, avec le grade d’aspirant. Puis il participe, en début d’année 1918, à un stage au Centre d’instruction aux mitrailleuses du Mans, dans la Sarthe.

Ses talents de meneur d’homme sont utilisés pendant plusieurs mois pour former les jeunes recrues, avant d’être affecté, le 2 octobre 1918, à l’escadrille F25, une escadrille de bombardements équipée d’avions de marque Voisins type X. Raoul BONNEVAL participera, avec cette escadrille, aux derniers combats pour libérer le territoire français, dans les secteurs de la Marne et des Ardennes.  Avant sa démobilisation définitive, en août 1919, Raoul est nommé sous-lieutenant. Puis, deux ans plus tard, il reçoit la Légion d’Honneur. Raoul épouse une fille de Fontaine-sur-Somme, commune peu éloignée de Sorel, où habitaient plusieurs de ses aïeux.

voisin type X

Après la fin de la guerre, Raoul, en tant qu’officier de réserve, continue à servir son pays, en tant que personnel navigant. Puis, après quelques années, il s’engage dans l’Armée et devient intendant militaire.

Il est rappelé à l’activité en 1938 suivant la mise sur pied de la Loi de couverture, puis rappelé lors de la mobilisation le 2 septembre 1939. Il est démobilisé le 31 juillet 1940 et se retire à Foix. Après la fin de la Seconde guerre, Raoul est à la direction de l’intendance de la 2e  Région militaire jusqu’en 1948 où il se retire à Amiens.

Même s’ils ne sont pas devenus officiers, ses copains, Louis BERTOUX et Paul ROLLE ont survécu à la Grande Guerre. Malgré une blessure à la hanche, Louis, le fils du menuisier, est devenu ensuite employé de commerce à Amiens. Paul, le fils du cantonnier, affecté dans l’Artillerie, a terminé la guerre, comme son copain Raoul, dans l’aviation.

Quant à Louis DELBARRE, le fils du berger, qui avait été affecté au 120e Régiment d’Infanterie de Péronne, il a été tué dès le début de la guerre, le 15 septembre 1914, à Binarville, dans la Marne.

Le petit frère de Louis a aussi été tué. Le frère aîné de Fernand SINOQUET a aussi été tué. Et même si Paul ROLLE est revenu vivant, son frère aîné a également été tué. Le village de 200 habitants est en deuil !

Raoul, Louis et Paul ont quitté Sorel-en-Vimeu. Le temps des copains est décidément bien fini !

L.J. et X.B.

« De la Somme à Bellefontaine – 22 août 1914 » – recherche collaborative 1891, 1892, 1893 – Département Somme.  Jean DELHAYE a réalisé la collecte de données pour la commune de Sorel-en-Vimeu.

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