ILS AVAIENT 20 ANS EN 1914 – Edouard BOUFFLET de Mesnil-Martinsart à Vecquemont

Né le 2 mars 1889, Edouard BOUFFLET est le fils d’Ernest BOUFFLET et de Marie DARRAS.

Ernest et Marie sont originaires du Nord-Est du département de la Somme. Ernest est né à Mesnil-Martinsart et Marie à Beaumont-Hamel, deux villages situés au Nord de la ville d’Albert, à proximité du département du Pas-de-Calais.

Ernest et Marie s’aiment. Argentine, née le 18 novembre 1878, est le fruit de cet amour. Pour « régulariser » la situation et permettre à l’enfant de porter le nom de son père, les deux jeunes adultes se marient quelques mois plus tard. Le mariage a lieu à Beaumont-Hamel, village de la jeune fille, puis la petite famille s’installe à Mesnil-Martinsart. Ernest y est charpentier.

Neuf mois après leur arrivée naît Lucien. Dans la petite maison de la Rue d’Auchonvillers à Mesnil-Martinsart, la fratrie s’agrandit encore avec l’arrivée de Louise en 1883, de Clémence en 1887 qui meurt en très bas âge, Edouard en 1889, Henri en 1890 puis Eugénie et Alice. Quand Louis, le dernier enfant de la fratrie, naît en 1902, Lucien, l’aîné des garçons, âgé de 19 ans, a déjà quitté le domicile familial. Quant à Argentine, l’aînée de la fratrie, elle est déjà mariée. Elle a épousé en 1896 Denis LEFRANC, un Amiénois.

Louise BOUFFLET, la sœur aînée d’Edouard, quitte le village de Mesnil-Martinsart. Elle a rencontré l’amour à Bussy-les-Daours. Bussy est un petit village agricole situé près de Vecquemont et de Daours, dans la Vallée de la Somme, entre Corbie et Amiens. Louise épouse Charles UCHART, charretier dans la ferme LENGELLE de Daours. Louise et Charles UCHART s’installent dans la Rue d’En Bas à Vecquemont. Edouard BOUFFLET y rejoint sa sœur. Il loge avec le jeune couple et devient journalier agricole dans les fermes de Daours et de Vecquemont.   

Lucien, le frère aîné de Louise et d’Edouard, arrive également à Vecquemont quelques mois plus tard. Alors qu’il était précédemment ouvrier mécanicien, il devient journalier agricole, comme l’est son frère Edouard. Après un passage par Englebelmer où il a rencontré son épouse Stéphanie puis quelques mois vécus à Liévin, Lucien s’installe à Vecquemont avec Stéphanie.

A 20 ans, Edouard est convoqué devant le Conseil de Révision du canton d’Albert. Il est affecté au 156e Régiment d’Infanterie de Toul. Démobilisé le 16 novembre 1912, il revient à Vecquemont. Edouard n’obtient pas le certificat de bonne conduite à l’issue de ses deux années sous les drapeaux, mais ça lui importe peu. Pour travailler dans les fermes de Daours et de Vecquemont, on ne lui réclame aucun certificat…

Henri, son frère cadet, débute son service militaire au 21e Régiment d’Artillerie d’Angoulême en octobre 1912, puis est muté au 2e Escadron du Train d’Amiens avec lequel il part en Afrique du Nord.

Le 25 juillet 1914, Edouard BOUFFLET épouse Fleurine DECAMPS dans le village de Riencourt où réside la jeune fille. Riencourt est un petit village de 250 habitants situé à l’Ouest d’Amiens, entre Airaines et Picquigny. En échangeant leurs consentements devant le maire du village, les deux jeunes mariés ne peuvent s’imaginer qu’une semaine plus tard, l’Allemagne déclarera la guerre à la France.

Le 1er août 1914, l’ordre de Mobilisation générale est affiché sur la porte de la mairie de Vecquemont. Edouard BOUFFLET est rappelé. Il rejoint le 120e Régiment d’Infanterie de Péronne.

Henri quitte le Maroc avec son unité pour rejoindre l’Est de la France.

Lucien, de son côté, purge une peine de deux ans de prison pour incendie volontaire en 1914. Mobilisé lui aussi, il part au front quelques mois plus tard avec le 45e RI de Laon.

Edouard BOUFFLET ne participe pas aux premiers combats du 120e RI. Il est maintenu provisoirement au dépôt du régiment jusqu’au 27 août. Fin août, quand il intègre une compagnie de combat, il perçoit le profond traumatisme moral dont ont été victimes les rescapés. Ils ont vu tomber tant de copains ! Plus de 1 000 hommes appartenant au 120e RI et au 18e Bataillon de Chasseurs à pied ont disparu le 22 août dans le petit village belge de Bellefontaine. Parmi les victimes, il y a Albert DURIER et Lucien CAZIER de Daours, le village voisin. Albert et Lucien étaient ouvriers agricoles, comme Edouard.

Le 10 septembre 1914, Edouard BOUFFLET combat dans la Marne. Il est blessé à Sermaize-les-Bains pendant la 1ère Bataille de la Marne. Evacué vers un hôpital de l’arrière pour être soigné d’une « plaie par balle à la cuisse droite », Edouard BOUFFLET ne peut retourner combattre qu’une année plus tard. La convalescence a été longue. Il est de retour sur le champ de bataille le 29 septembre 1915. Quinze jours plus tard, il est à nouveau blessé ! La mort l’a frôlé. Edouard a reçu des éclats d’obus dans la nuque.

Après une nouvelle période d’hospitalisation, Edouard retrouve le front fin janvier 1916. Il participe ensuite avec ses rares copains rescapés du début de la guerre et les nombreuses recrues du 120e RI aux combats de Berny-en-Santerre à l’occasion de la Bataille de la Somme. Il est considéré comme disparu par l’état-major. En réalité, il a été capturé par les Allemands et emmené au camp d’internement de Walm. Edouard BOUFFLET n’est rapatrié qu’à la fin du mois de décembre 1918. Sur le territoire français, la guerre est terminée depuis plusieurs semaines. Blessé avant d’être capturé par l’ennemi, il souffrira toute sa vie d’une désarticulation de l’épaule droite.

Lucien, son frère aîné, est mort. Transporté à l’ambulance de Verneuil-sur-Marne, il a succombé à ses blessures le 14 mars 1915. Il repose à la nécropole « Le prieuré de Binson » à Chatillon-sur-Marne.

Henri, le frère cadet, a survécu sans être trop abimé physiquement. Quand au jeune Louis, âgé de 16 ans à la fin de la guerre, il n’a pas été mobilisé.

Chez les BOUFFLET comme dans de nombreuses familles, les statistiques morbides sont respectées. Un frère est mort, un frère est gravement blessé et un frère a échappé aux blessures physiques.  Quant au 4e, il a été sauvé par son âge…

Pendant la guerre, les autres membres de la famille BOUFFLET se sont réfugiés à Vecquemont chez Louise et Charles UCHART. Habitants d’un village situé à quelques centaines de mètres des zones de combats, près de Thiepval et Beaumont-Hamel, les parents BOUFFLET et leurs enfants les plus jeunes n’avaient d’autre choix que de quitter leur maison de Mesnil-Martinsart.

Après la guerre, plusieurs d’entre-eux sont restés à Vecquemont.

Marie, la mère, devenue veuve, s’est installée avec ses fils Edouard et Louis. Ils habitaient dans la rue d’En Bas, à côté de chez Henri BOUFFLET et son épouse Estelle. Les maisons voisines étaient occupées par des anciens réfugiés comme les DEFRANCE de Mesnil-Martinsart ou les CUVILLIER et les FAUQUET de Beaumont-Hamel.

Edouard et Aline BOUFFLET ont eu trois garçons prénommés Camille, Lucien et Maurice, le second né en 1920 se voyant attribuer le prénom de l’oncle disparu pendant la guerre.

A l’adolescence, Camille et Lucien deviennent ouvriers agricoles, comme leur père, travaillant chez CAVILLON à Vecquemont ou chez NAVET à Querrieu. Maurice BOUFFLET, le fils cadet, est laitier dans la ferme DARRAS à Daours.

Louis et Henri, les frères d’Edouard, sont restés également à Vecquemont. Ils ont eu plusieurs enfants.

Henri BOUFFLET, lui qui semblait n’avoir subi aucune blessure pendant le conflit, est décédé à Vecquemont en 1927 à l’âge de 37 ans seulement. La guerre l’a t elle détruit à petit feu ?

Touchée par la Grande Guerre, la famille BOUFFLET de Mesnil-Martinsart et Vecquemont a également été victime de la Seconde Guerre mondiale. Maurice BOUFFLET, le fils cadet d’Edouard, a été emmené en Allemagne comme prisonnier. Il y est mort en 1943. Il avait 22 ans.

Monument aux morts de Mesnil-Martinsart

Le nom de Lucien BOUFFLET est inscrit sur le monument aux morts de Mesnil-Martinsart, commune d’origine de la famille. Le nom de son neveu, Maurice, est gravé sur le monument de Vecquemont, village d’adoption de la famille BOUFFLET.

Lionel JOLY et Xavier BECQUET

Monument aux morts de Vecquemont

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