Au soir du 18 août, le Roi Albert 1er décide replier l’armée de campagne vers Anvers, car il sait que les troupes belges ne pourront résister dans la région de Namur face à une centaine de milliers de soldats allemands disposant de 400 pièces d’artillerie. Ils ne peuvent disposer du soutien des alliés qui sont encore trop éloignés. Les hommes du Royaume-Uni, débarqués dans les ports français, ne sont encore qu’à hauteur de Maubeuge. Les Français sont, eux, installés entre Namur et Dinant, pour garder les ponts de la Meuse. Les 9 forts de Namur vont donc devoir subir les attaques allemandes sans pouvoir compter sur un soutien extérieur.
Après Liège, les Allemands se sont fixés comme objectifs de prendre les forts de Namur, puis d’en terminer ensuite avec ceux d’Anvers. Ce sont, en effet, les 3 seules villes belges ayant été fortifiées par un réseau de constructions périphériques. Ces ceintures de forts devaient permettre de repousser l’invasion des pays voisins (Allemagne, Royaume-Uni et France). La question de la neutralité n’est plus d’actualité. Les Belges font maintenant partie des ennemis de l’Allemagne et les forts de Namur vont subir l’assaut de l’artillerie allemande. En effet, suite au long siège des forts liégeois, les Allemands ont décidé d’utiliser directement l’artillerie lourde pour obtenir rapidement la reddition des 9 forts de Namur.
Le même jour, en France, la presse évoque la belle victoire française à Dinant. Cette ville wallonne très proche de Givet et de la frontière française semble constituer un objectif particulier pour l’armée allemande. Dès le 15 août, elle tente d’y entrer et de prendre la citadelle surplombant la Meuse. Cette citadelle est occupée par des soldats français. Malgré la résistance du 148e régiment d’infanterie, la citadelle et la tour de Montfort sont prises par les Allemands. Le 33e régiment d’infanterie d’Arras, accouru d’Anthée, reçoit l’ordre d’aller réoccuper la citadelle. Pour atteindre la citadelle, il faut franchir la voie ferrée et le pont de la Meuse, soumis à un bombardement extrêmement violent. Les 2 compagnies qui s’élancent perdent la moitié de leur effectif. C’est à cet endroit que le lieutenant Charles de Gaulle sera blessé.
Vers 16 heures, les 8e, 127e, 110e et 84e régiments d’infanterie arrivent en renfort avec une puissante artillerie. L’offensive massive est tellement rapide qu’elle surprend les Allemands, lesquels abandonnent la citadelle et battent en retraite. Les habitants de Dinant accueillent avec enthousiasme les Français qui ont chassé l’envahisseur. Plusieurs civils, suspectés d’avoir aidé les Français, ont été abattus par les Allemands avant leur départ. Des prisonniers français, restés dans la citadelle, ont également été achevés.
Mais les Allemands n’ont pas dit leur dernier mot. Les troupes s’accumulent maintenant à proximité de la ville de Dinant. Le 18 août, les Français débutent des travaux de fortification de la rive gauche, à la grande surprise des habitants qui ne comprennent pas pourquoi ils ne cherchent pas à s’appuyer sur la citadelle, rive droite, pour assurer la défense. Les blessés français sont évacués vers la rive gauche, pour être transportés ensuite en France. Les missions de reconnaissance allemandes sont toutes déjouées et des éclaireurs sont régulièrement tués par des Français placés en embuscade. L’Etat-major allemand est exaspéré par cette situation. Il veut absolument prendre Dinant. S’agit-il uniquement de la volonté de progresser vers Paris ou s’agit-il plutôt de faire un exemple ?
Le curé de Hulsonniaux croise le commandant d’une troupe de 2 000 soldats allemands traversant son village situé à quelques kilomètres de Dinant. En sa présence, il examine une carte sur laquelle apparaissent des traits rouges. « Ce sont, lui dit-il, les villages qui doivent disparaître ». Les noms sont ceux de Mesnil, Onhaye, Sorinne et Dinant. D’autres témoignages rapportent les mêmes genres de propos de la part d’officiers allemands. Il y a des villages qui doivent être rayés de la carte… En ce 18 août, les habitants de Dinant sont loin d’imaginer ce qui va les attendre…
Parmi les victimes de Dinant, on en compte 5 jeunes hommes originaires de la Somme. Nés ans la Somme, ils résidaient, pour la plupart dans le département limitrophe du Pas-de-Calais, tout prêts de la vallée de l’Authie. Ils avaient donc, naturellement, été affectés au 33e régiment d’infanterie d’Arras. Ces jeunes hommes effectuaient leur service militaire au moment de la déclaration de guerre. Ils ont été envoyés directement en Belgique pour y mener les premiers combats. Clément DUBOS, de Maizicourt, était mécanicien forgeron à Hébuterne, Alfred QUILLET de Nampont-Saint-Martin était cultivateur à Groffliers, Louis SAVOYE de Dominois était mineur à Le Parcq, Eugène GRY était boulanger à Authie et Albert REVAUX était originaire de Doullens. Ils avaient tous les 5 entre 20 et 23 ans. Pour ces 5 fantassins originaires de la Somme, la vie s’est arrêtée à Dinant. Sur le pont où le lieutenant De Gaulle a failli, lui aussi, y perdre la sienne.
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