4 septembre 1914 : champagne et désertion

Il est des symboles à côté desquels les Allemands ne voulaient pas passer. Après avoir, provisoirement, renoncé à entrer dans Paris, l’Etat-major germanique souhaite prendre, au plus tôt, deux villes importantes de l’Est de la France : Nancy et Reims.

Nancy, première grande ville après la frontière d’Alsace, n’est quasiment pas fortifiée. Mais restant défendue par les Français, son siège demandera plusieurs jours aux Allemands.

A Reims, la situation n’est pas la même. Comme le haut-commandement français l’avait fait pour Amiens, il a demandé aux troupes françaises de quitter la ville dans la journée du 3 septembre. Reims, ville ouverte, désertée par les troupes françaises, est occupée par les Allemands dès le 3 septembre au soir.

Le processus est alors toujours le même. Un haut officier, le général Zimmer, se rend à l’hôtel de ville. Il exige des denrées et du matériel, ainsi que le dépôt d’une caution d’un million de francs comme garantie de la bonne livraison. On passe ensuite tout près d’un incident qui aurait pu, comme ce fut le cas à de nombreuses reprises, entraîner une prise d’otages ou des exécutions de civils. Le 4 au matin, pendant qu’il est encore à l’hôtel de ville, des obus commencent à tomber sur Reims. Zimmer pense alors qu’il s’agit de tirs français et qu’il s’agit donc d’un guet-apens. Il faudra qu’un employé de mairie lui apporte un éclat d’obus pour qu’il le reconnaisse comme étant bien allemand. Il fait alors arborer des drapeaux blancs au–dessus de la mairie pour faire cesser le bombardement. Bien que bref, le bombardement a été très intense. Il a causé la mort d’au moins 60 Rémois. En début d’après-midi, les troupes allemandes entrent en masse dans la cité, se rappelant avec fierté que 44 ans plus tôt, c’était également un 4 septembre qu’ils avaient envahi la ville. Des canons sont immédiatement installés autour de l’hôtel de ville, et la Kommandantur s’installe à l’hôtel du Lion d’Or. Le champagne va couler à flot.

Profitant du retrait des 1ère et 2e armées françaises, l’empereur Guillaume II attache une importance particulière à prendre la ville de Nancy. Après une première tentative de déborder Nancy par le sud qui se solde par un échec, les Allemands décident d’attaquer tous les points hauts situés autour de la ville. Ils veulent, en effet, empêcher les Français d’observer et de défendre la ville à partir des collines constituant le Grand Couronné. Malgré la violence des attaques de l’artillerie, les Français résisteront plusieurs jours.

Plus à l’ouest, la journée du 4 septembre est relativement calme, par rapport aux journées précédentes.  Le deuxième grand choc entre les 2 belligérants est imminent. Près d’un million d’hommes de chaque côté sur un front allant de Belfort à Verdun et de Verdun à l’Est de la capitale. Les Allemands avancent dans certains secteurs et s’emparent de quelques communes. C’est alors l’occasion de combats quand les Français tentent de les en chasser. Ainsi, Sainte-Menehould, en Argonne, ville qui sera reprise par les Français le 4 septembre au soir. Le bruit des canons reste très proche et des avions allemands survolent la ville, mais, pour la grande joie des habitants, la cité redevient française, moins de 48 heures après avoir été occupée par les Allemands. Sainte-Menehould ne sera plus jamais occupée ensuite, et deviendra une base arrière de l’armée française. Un petit village est repris également aux Allemands, à proximité de Sainte-Menehould. Il s’agit de Dommartin-sur-Yèvre. Le 51e régiment d’infanterie de Beauvais participe à sa libération. Au moins 4 jeunes hommes de la Somme y laisseront la vie : Léon COUVIN, de Montmarquet ; Lucien DUBUT, de Misery ; Louis MAILLY, d’Equancourt et Louis POISSANT, de Ligescourt.

Le 4 septembre sera également une journée tragique pour un jeune homme de la Somme, et pour sa famille, à jamais salie.

Il travaillait comme charpentier avec son père, dans la petite commune de Manancourt (aujourd’hui Etricourt-Manancourt) dans la Somme. Georges résidait dans ce petit village de l’Est du département de la Somme avec son père et sa mère. Son frère aîné, Jules, avait déjà quitté la maison. Georges a été incorporé le 9 octobre 1913 pour effectuer son service militaire et s’est rendu directement à Stenay où le 120e régiment allait caserner, quittant la ville de Péronne. C’est de Stenay qu’il a suivi le régiment pour participer à la grande offensive du général Joffre. Il a connu l’enfer du 22 août, à Bellefontaine, où près de 1 000 de ses copains du 120e sont tombés. Et après ? Nos recherches ne nous ont pas permis de le savoir. Tout ce qu’on sait, c’est que sa vie s’est arrêtée début septembre 1914. Vraisemblablement à Perthes (Haute-Marne), le 4 septembre. Même si son nom sera inscrit ensuite sur le monument aux morts de son village, il n’a pas été reconnu « Mort pour la France ». Et pour cause, puisqu’il a été fusillé. Pour désertion. Dans quelles conditions ? Nous ne le savons pas.

Un autre gars du 120e RI, réserviste quant à lui, rappelé le 2 août, a également été fusillé début septembre pour désertion.  Henri Parpaite, ferronnier à Givonne, dans les Ardennes, avait 26 ans.

Il y aura, officiellement 1 009 Français fusillés par l’armée française pendant la guerre, dont au moins 640 (de manière attestée) pour désobéissance militaire ou désertion.

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