
François Jean Baptiste DELVIGNE est né à Péronne le 14 janvier 1891, le père est inconnu, la mère Léonie DELVIGNE, originaire de Gouzeaucourt dans le département du Nord, a 28 ans. Elle habite le Faubourg de Paris à Péronne.
François sera le second enfant d’une fratrie de huit. L’aîné, Léon, est né en 1888 et le dernier, Robert, en 1906.
Les naissances des deux premiers enfants, Léon et François, ont été déclarées à Péronne et celles des six autres à Ham. Tous les enfants portent le patronyme de DELVIGNE. Ils ont tous été reconnus par leur mère.
C’est après la naissance de François, que Léonie a déménagé pour habiter Ham, rue Marchande.

Tous les enfants DELVIGNE ont fréquenté l’école de Ham, soit avec Edmond ETEVE ou un de ses adjoints.
En 1906 Léonie vit toujours à la même adresse avec sa famille et un ami, Edouard BOULON né en 1852 à Péronne, il est mécanicien.
En 1911, sur les sept enfants, trois ont trouvé du travail, François est manouvrier, ses deux frères Alfred et Maurice sont chaudronniers.
Edouard, le compagnon de Léonie est mécanicien à la distillerie Sébastopol, fondée en 1854, par cinq fabricants de sucre de la ville de Ham et des communes environnantes. Cette usine distille de l’alcool de betteraves.

Ham, c’est une petite ville située aux confins du Vermandois, du Santerre et du Noyonnais, à la limite Est du département de la Somme, de l’Aisne et au Sud-Est de l’Oise. Ham est à une vingtaine de kilomètres des communes de Péronne, Saint Quentin et Noyon.
Ham regroupe deux quartiers nommés Estouilly et Saint Sulpice. La population est de 3280 habitants en 1906, mais en 1921 elle est tombée à seulement 2140.

À la fin du XIXe siècle, la ville se développe grâce à l’industrie favorisée par la mise en service de la ligne de chemin de fer d’Amiens à Laon par la Compagnie du Nord, et aussi à la réalisation du canal de la Somme. Le commerce y est florissant grâce à ses nombreuses voies de communication.

L’activité industrielle se caractérise alors par la fabrication de sucre, et à Saint-Sulpice, par l’activité métallurgique (fonderie et construction mécanique).
La sucrerie, fondée au milieu du 19ème siècle, ne sera pas reconstruite après les bombardements de la ville en 1917.
Pendant la Grande Guerre, après la bataille de la Somme, la ville est dans la zone des combats, puis occupée par l’armée allemande.
En 1917, l’Armée allemande se replie sur la ligne Hindenburg, ligne fortifiée de Lens à Soissons, pratiquant, sur les territoires abandonnés, la tactique de la terre brûlée.
C’est à ce moment que la forteresse et l’ensemble de la ville de Ham sont dynamités par les Allemands le 19 mars 1917.

François DELVIGNE mesure 1m64, il a les yeux marron et les cheveux bruns, son degré d’instruction est de niveau 2, il sait lire et écrire. Il réside à Ham comme manouvrier, avec sa mère Léonie et ses frères et sœur.
Il quitte Ham le 10 octobre 1913 pour accomplir son service militaire et incorporer à Amiens le 72ème Régiment d’Infanterie. Né à Péronne mais habitant à Ham, il n’y a pratiquement pas de copains de Ham de sa génération avec lui.
Parti aux armées le 5 aout 1914 il n’est certainement pas trop habitué à l’entrainement. Le régiment monte vers la frontière Belge, à Virton de nombreux jeunes soldats se font tuer. A la fin aout, c’est la retraite par Cesse, Thénorques, Poncelet dans le département de la Meuse.
Les différents régiments samariens organisent alors une ligne de défense sur la Marne.
Cette première bataille de la Marne va durer du 6 au 13 septembre 1914.
La vie de François s’arrête dans la Marne, il est tué à Maurupt-le-Montois le 10 septembre, son décès est constaté le 14 septembre. Il avait 23 ans.
La transcription ne sera faite que le 15 septembre 1917 à Ham.
François DELVIGNE est inscrit sur le Monument aux Morts de Ham, inauguré en octobre 1925.
Sur les cinq fils de Léonie DELVIGNE nés avant 1906, deux ont été mobilisés en août 1914, François et Léon.
– Léon DELVIGNE, l’aîné de la fratrie, né en 1888, part au service militaire le 5 octobre 1909 au 8ème Régiment d’artillerie, il est libéré le 25 septembre 1911, à cette époque le service militaire dure deux ans.

Le 1er août 1914 il est mobilisé et affecté à la réquisition des animaux du 5 au 6 août 1914. Sa mission terminée, il est renvoyé dans ses foyers à cette date.
Léon est de nouveau rappelé le 26 janvier 1915, mais comme il habite Ham, pays envahi, il est considéré prisonnier civil par les allemands du 28 août 1914 jusqu’au 16 décembre 1918. Père de 4 enfants, il ne sera démobilisé que le 12 février 1919, puis dégagé de toutes obligations militaires en octobre 1937.
– Alfred DELVIGNE le troisième fils, né en 1894 à Ham, mécanicien, est incorporé le 1er septembre 1914 au 29ème Régiment d’artillerie, et passe ensuite dans différents régiments de ce même corps d’armée, dont par exemple le 4ème Groupe d’Artilleurs d’Afrique.
Alfred, brigadier très méritant reçoit une citation en juillet 1918. Nommé maréchal des logis le 3 aout 1918, il sera démobilisé le 16 août 1919.

Alfred ne revient pas à Ham, mais part vers Avesnes dans le Nord pour y trouver du travail, puis dans la région parisienne à Puteaux, en qualité d’ajusteur.
– Maurice DELVIGNE né en 1895, manouvrier, classe 1915, était « excusé » de partir au front car il était en pays envahi.
Reconnu bon pour le service armé le 22 avril 1918, il est dirigé vers le 9ème bataillon du 128ème Régiment d’Infanterie le 20 juillet 1918. Il sera mis en congé illimité le 3 septembre 1919.
– Marcel DELVIGNE né en 1897, ajusteur, est incorporé le 12 avril 1919 au 7ème Régiment de dragons, mais envoyé en congé illimité le 8 octobre 1919. Comme son frère Alfred il part dans le département du Nord et se retire à Ferrières-la-Grande près d’Avesnes.
– Emile DELVIGNE né en 1901, effectue son service en 1922, rappelé le 25 août 1939, il est fait prisonnier à Saint-Malo le 22 juin 1940, il est rapatrié le 17 mai 45.
Léonie, leur mère, est décédée en 1921. Son ami, Edouard BOULON, serrurier, vit alors avec Marcel, chaudronnier, Emile et Robert, manouvriers, boulevard du Vieux Canal à Ham. Maurice DELVIGNE, le quatrième de la fratrie, vit sur ce même boulevard. Chaudronnier, il est marié et a deux enfants.
De nombreux jeunes de Ham de la classe 1911 ont combattu pendant cette guerre comme :
– Albert BOGUET du 120ème Régiment d’Infanterie sera tué le 22 aout 1914 à Virton en Belgique. Il est inhumé au cimetière du Radan à Bellefontaine, son nom est inscrit sur une plaque commémorative dans l’église de Ham-Estouilly.

– Paul DETREE qui se battra à côté de François DELVIGNE au 72ème Régiment d’Infanterie, sera blessé à Servon (Marne) le 15 septembre 1914. Prisonnier en 1917, il rentrera d’Allemagne en juillet 1919. Il sera promu lieutenant en mai 1919 et capitaine de réserve en 1933.
– René ENNUYER recruté au 67ème Régiment d’Infanterie à Saint-Quentin, est tué le 24 aout 1914 à Longuyon (Meurthe-et-Moselle).
– Henri LACROIX du 108ème Régiment d’Infanterie, est tué la 14 septembre 1914 à Vitry-le-François (Marne).
Cinq autres copains nés en 1891 à Ham connaitront la guerre des tranchées et seront tués sur des lieux de bataille bien connus, comme la Harazée, la trouée de Navarin, le bois de la Gruerie, en Argonne. D’autres décéderont de leurs blessures dans les hôpitaux de campagne.
A Ham, il existe deux monuments aux morts : Ham avec 123 noms et Saint-Sulpice, 45 noms.


Didier Bourry – Danièle REMY– Lionel JOLY
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