Albert BRAMAT est né le 20 juillet 1892 à Beaune-d’Allier. Ses parents se prénomment Jean et Marie.
Ils sont cultivateurs dans ce village du Massif Central du département de l’Allier. Albert a un frère prénommé Victor, de deux ans son aîné.

L’enfance d’Albert est difficile. Il n’a même pas deux ans quand sa mère meurt en accouchant d’un bébé qui perd aussi la vie. Le frère aîné Victor, âgé de 5 ans, reste dans la ferme de son père alors que le plus jeune, Albert, est placé chez son oncle Joseph et sa tante Jeanne. Joseph est cantonnier dans le village voisin de La Celle.

Jean BRAMAT se remarie quelques années plus tard. Il épouse Alexandrine et quitte son village pour s’installer avec sa nouvelle épouse dans la commune de Bézenet où les mines de charbon ont besoin d’une main d’œuvre abondante. Jean BRAMAT devient mineur. Jean et Alexandrine auront plusieurs enfants ensemble. A l’âge de 8 ans, Albert rejoint son père et sa belle-mère à Bézenet.

Albert et Victor poursuivent leur scolarité à Bézenet. Albert n’est pas vraiment un bon élève. La vie a déjà été bien éprouvante pour le petit Bourbonnais.
A 14 ans, Albert subit encore un nouveau changement. Jean, son père, quitte son emploi de mineur et revient avec sa famille dans son village de Beaune-d’Allier. Même si les communes de Beaune, de La Celle et de Bézenet ne sont pas éloignées, chaque changement est difficile à vivre pour les jeunes garçons.

Albert trouve un emploi chez Léon PERRIN, un fermier de la commune dans le lieu-dit de Poinat. Logé et nourri, Albert s’habitue à cette vie simple d’ouvrier agricole. Elle lui convient bien. Il change de ferme et part dans le hameau de Cornassat chez Gilbert PERROT. Albert BRAMAT commence à penser à son avenir. S’il reste dans le village, la seule voie possible est l’agriculture et l’élevage. Doit-il partir à la ville ou « monter », comme le font beaucoup de jeunes hommes du Massif-Central, vers la Capitale ?

Le service militaire lui permettra certainement d’approfondir sa réflexion. Jugé apte au service armé, Albert est affecté au 121e Régiment d’Infanterie. Le 10 octobre 1913, il part vers Montluçon où est casernée son unité. Il a 21 ans.
Montluçon, sous-préfecture de l’Allier, est une grande ville qui compte plus de 30 000 habitants. Malgré une légitime appréhension pour lui qui n’a vécu jusqu’alors que dans des villages et hameaux, Albert BRAMAT apprécie la vie en collectivité dans la caserne Richemont. Il retrouve de nombreux jeunes hommes de son âge du monde agricole, à leur arrivée aussi perdus que lui. Ils sont plusieurs du canton de Montmarault. Leurs visages ne sont pas inconnus. Ils se sont déjà rencontrés à l’occasion de foires agricoles ou de fêtes de villages.

Le 3 août 1914, l’Allemagne déclare la guerre à la France. Albert BRAMAT qui n’a jamais quitté son département que pour celui voisin du Puy-de-Dome est envoyé, comme tous ses copains du 121e Régiment d’Infanterie, à près de 500 km de Montluçon, vers le Nord-Est de la France. Le 7 août, les hommes quittent la caserne Richemont pour prendre le train. Le trajet de la caserne à la gare apparaît comme une marche triomphale. La ville de Montluçon aime son régiment. Chaque soldat reçoit un bouquet. Personne n’imagine vraiment ce qu’est une guerre…

Dans la nuit du 8 au 9 août, ils arrivent à Girancourt dans le département des Vosges.
Après un repos de quelques heures, les hommes du 121e RI débutent leur marche pour s’approcher de la frontière.
Le 14 août après-midi, les Bourbonnais connaissent l’épreuve du feu dans le village de Petitmont en Meurthe-et-Moselle. Dès le premier combat, les pertes sont très importantes. Plusieurs centaines d’hommes sont hors de combat. Les morts se comptent par dizaines. La nuit se passe à enterrer les morts, à relever les blessés et à remettre de l’ordre dans les unités.

Le 20 et le 21 août, à Hartzviller en Moselle, les combats sont encore particulièrement meurtriers pour le régiment de Montluçon. Il faut attendre le 1er septembre pour que la situation s’apaise. Certaines sections sont décimées. Albert a vu tomber plusieurs copains à ses côtés. La guerre vient à peine de débuter et le traumatisme est déjà violent.
Le 13 septembre, le 121e est relevé. Les hommes prennent le train en gare de Darnieulles dans les Vosges et arrivent le lendemain à Creil dans l’Oise. Fin septembre, deux des trois bataillons du régiment sont envoyés dans la Somme, près de Roye. Ils se dirigent vers Le Quesnoy-en-Santerre et Parvillers.

Le village de Parvillers est tenu par les Français qui repoussent de multiples assauts ennemis. Les Allemands utilisent alors l’artillerie pour tenter de reprendre Parvillers. Le 6 octobre, à 6 heures de matin, commence un marmitage encore plus intense que les jours précédents. Les fantassins allemands, couverts par leur artillerie, lancent une attaque particulièrement violente. Les Français doivent battre en retraite et abandonner le village.
Ce 6 octobre 1914, Albert BRAMAT est mort. Il avait 22 ans.

Son frère Victor a survécu à la guerre. Ayant quitté l’Allier pour la Corrèze avant la guerre, Victor avait trouvé un emploi à la Compagnie des Chemins de fer d’Orléans. Rappelé au mois d’août 1914, il a été mobilisé par l’Armée dans son emploi. Un emploi qui lui a peut-être sauvé la vie.
Après avoir été inhumé à proximité du lieu de sa mort, le corps d’Albert BRAMAT a été transféré après la guerre dans la nécropole nationale de Montdidier dans le Sud-Est de la Somme. Il y repose encore.

Les élèves de la classe de CM2 de la Cité du Nord à Montdidier se sont recueillis le jeudi 11 mai 2023 devant sa tombe et y ont déposé des bleuets en papier qu’ils avaient confectionnés en classe.

Puis quelques éléments de la jeunesse d’Albert ont été racontés aux enfants par un représentant de l’association « De la Somme à Bellefontaine ». Quand les deux drapeaux français se sont inclinés sur la tombe d’Albert, un moment de silence et de recueillement a été respecté par les élèves et les adultes présents.

Pendant quelques minutes, Albert BRAMAT a retrouvé une forme d’existence. Celle d’un petit paysan bourbonnais qui n’avait d’autre ambition que de vivre tranquillement et de trouver enfin le bonheur. Trouver en tant qu’adulte, le bonheur que la vie d’enfant avait eu tellement de mal à lui offrir.
Albert BRAMAT a 22 ans pour toujours.

Xavier BECQUET
Merci à Jean-Claude DECORPS, Anick BARDET et Danièle REMY pour leur contribution

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