Le village de Soumagne, à l’Est de Liège, est le théâtre d’un va-et-vient continuel de troupes allemandes se renforçant pour relancer l’attaque sur les forts. C’est précisément le 9 août, lors du passage du 27e régiment d’infanterie allemand, qu’un obus provenant du fort de Fléron vient exploser en plein centre du village guidé par les guetteurs belges nichés dans le clocher de l’église de Magnée. La compagnie commandée par l’Oberlieutnant Von Lessel est fortement touchée. 18 Allemands sont tués et 12 blessés. La population locale y voit comme un signe de la justice divine. Ces féroces agresseurs peuvent, eux-aussi, connaître l’horreur…
Soumagne est situé entre les axes de pénétration des 11e et 14e brigades germaniques. Ces deux brigades ont comme objectif sont de prendre les forts de Fléron, Chaudfontaine et Embourg. Mais elles sont mises en échec, dès le 5 août, et se vengent de cette humiliation sur la population civile notamment dans le hameau de Fecher. 118 civils sont massacrés et plus de 100 maisons détruites.
Le massacre de Soumagne n’est pas un cas isolé. Loin de là ! Les villages de Berneau, Battice (33 victimes civiles), Blegny, Esneux, Sprimont, Magnée, Mouland, Olne, Hermée, Rétinne, Romsée, Warsage, Herstal, Lixhe, Louveigné, Baelen, Herve ont à déplorer de nombreuses victimes civiles exécutées par les Allemands, entre le 5 et le 8 août.
Les 8 et 9 août, ce sont encore 19 civils qui sont exécutés à Francorchamps et Hockai. Abattus sans raison. Simplement parce qu’ils sont Belges et que l’armée des « neutres » Belges résiste avec courage et empêche l’armée allemande de progresser plus rapidement vers le Sud.
Dès le début, l’Allemagne considère que la guerre doit être complète, c’est-à-dire menée contre les militaires, mais aussi contre les pays, donc contre les civils. Dès l’entrée en Belgique, l’agression envers la population est réelle. Les troupes allemandes ne se contentent pas de garantir leur sécurité par des prises d’otages, elles procèdent également à des exécutions de civils dans les villages.
« Seront tenus responsables de toutes les destructions des routes, chemins de fer, ponts,etc… les villages dans la proximité des points de destruction .Chaque personne qui s’approchera d’une place d’atterrissage d’aéroplane ou de ballons, jusqu’à 200 mètres, sera fusillée sur place. Les otages seront pris largement. Les plus graves contributions de guerre seront infligées » peut-on lire dans une proclamation allemande.
Chaque action de résistance au passage des troupes ennemies est considérée comme une action de résistance du village dans sa totalité.
La Belgique se sent rapidement « violée » par l’envahisseur. Citons encore le cas d’un autre village wallon. Les malheurs de la petite commune de Melen commencent avec l’arrivée de soldats allemands mis en déroute par les défenseurs du fort de Fléron et faisant retraite le 6 août. Ils réveillent les habitants et tuent au moins onze d’entre eux. Le 8 août, le même régiment revient à Melen, saisit soixante-douze habitants, les conduit dans un champ et les exécute collectivement (dans ce groupe figurent 8 femmes et 4 enfants). Les maisons sont incendiées. En deux jours, on peut dénombrer 108 victimes civiles.
Ces exactions sont peu à peu connues dans toute la région, puis dans la Belgique. De nombreux Belges de la région de Liège commencent à quitter leur pays pour se réfugier essentiellement aux Pays-Bas. Les habitants de la Province de Luxembourg ne réagissent pas vraiment, par faute d’information ou par certitude qu’ils ne peuvent connaître le même sort. L’avenir prouvera pourtant qu’ils ont eu tort…
(illustration: « Ils ont fusillé une jeune fille » – estampe de Jean Veber, 1914)
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