
Cramont est un petit village du Ponthieu situé entre Saint Riquier et Bernaville. Il fait partie du canton de Ailly-le-Haut-Clocher. Un peu plus de 400 habitants sont répartis dans le village et ses quatre hameaux environnants : » le Ménage « , » les Masures « , « les 4 saisons » et » Moulin blanc « . Il est bordé au sud-ouest par la chaussée Brunehaut, ancienne voie romaine allant d’Amiens à Montreuil-sur- Mer.
C’est un village tourné vers l’agriculture et l’élevage, mais on y trouve aussi quelques artisans ; cordonnier, charron, ferblantier, négociant, cafetier… tout pour que la vie y soit agréable.
C’est dans le quartier des Masures, au sud du village que le 14 novembre 1890 nait Louis Léonce GOSSELIN, fils de Xavier et de son épouse Marcelline BENTEUR, tous deux originaires de Cramont. Ils s’y étaient mariés le 26 septembre 1874, Xavier avait 24 ans et Marcelline 23. De manouvriers, ils deviendront débitants de boissons par la suite.

Le 9 avril 1875, la naissance du premier enfant de la famille GOSSELIN est déclarée à la mairie de Cramont, Marie Firmine, suivie par Honorine, le 28 juillet 1881, puis François, le 2 avril 1886 ; Gédéon le quatrième, nait le 10 octobre 1887. Ainsi, Louis est le petit dernier de la fratrie.

Tous les enfants GOSSELIN vont fréquenter les deux écoles du village, les trois garçons iront avec Florent TERNOIS et les deux filles avec Prudentienne PANET.
En 1893, le 6 mai, Xavier décède, Marcelline doit assumer seule la gestion de la famille. Elle est alors coquetière, sans doute un métier plus rémunérateur que manouvrière. Elle vend des œufs et des volailles à Saint-Riquier ou Abbeville.
Honorine, leur deuxième fille, décède en 1896 à l’âge de 15 ans.
Marcelline, veuve depuis trois ans, se remarie à Cramont le 7 mai 1896 avec Ferdinand Frédéric BOCQUERY, veuf depuis 1887. Ferdinand est ouvrier maréchal et habite dans cette commune.
– En 1907, le premier fils prénommé François est un garçon boulanger, aux cheveux et aux yeux noirs, il mesure 1m58 et possède un bon niveau d’instruction.
Au moment du service militaire, ajourné à deux reprises en 1907 et 1908 pour faiblesse, il est finalement incorporé le 6 octobre 1908 à la 2ème Section d’Administration.
Déclaré déserteur en février 1909, il est alors dirigé sur le 51ème Régiment d’Infanterie de Beauvais le 11 avril de la même année, il sera envoyé en disponibilité le 25 septembre 1910 avec le certificat de bonne conduite.

N’ayant pas rejoint son régiment à la mobilisation, il est déclaré insoumis.
Le 21 juin 1917 il sera réintégré au 51ème.
François est blessé au bras gauche par éclats d’obus le 17 juillet 1917, lors de l’attaque de la cote 304 au nord-ouest de Verdun (Meuse), l’objectif de cette journée étant de reprendre la première ligne ennemie.
La cote 304 ne fut reprise que le 20 août 1917.

Rétabli, il passe au 87ème Régiment d’Infanterie le 25 novembre 1917 dans le même secteur, avant de rejoindre la Somme dans la région de Louvrechy à partir du mois d’avril 1918. François sera alors blessé une seconde fois le 1er juin à Sourdon (Somme) par éclats d’obus aux deux cuisses.
Il retrouvera la vie civile en mars 1919 et se mariera en octobre 1928 à Frouville (Val d’Oise) avec Isabelle BARRE, veuve et originaire de la Somme, et décèdera à Rouen le 11 janvier 1962.
– Gédéon, le second fils, classe 1907, le boulanger de Cramont, cheveux châtains, aux yeux bleus, mesurant 1m57, est incorporé le 7 octobre 1908 à la 2ème Section d’Administration comme son frère aîné François.
Caporal le 1er octobre 1909, il est en disponibilité le 25 septembre 1910. Rappelé le 4 août 1914, il passe à la 4ème Section d’Administration le 23 février 1915.
Le 1er septembre 1916 il sera affecté au 24ème Régiment d’Infanterie, puis le 29 octobre au 67ème, ce dernier régiment d’infanterie est alors en position près de Bouchavesnes (Somme). C’est la bataille de la Somme.
Gédéon y est blessé au crâne, à la cuisse et au bras gauche le 14 novembre.

Il décèdera le 30 novembre 1916 des suites de ses blessures et sera inhumé dans la nécropole de Bray-sur-Somme, tombe 621, parmi les 1045 soldats qui y reposent.
Gédéon avait 29 ans.

– Louis, le petit frère de 1890, a quitté Cramont pour chercher du travail. Il est domestique à Valmondois (près de l’Isle-Adam, Val-d’Oise) lorsqu’il passe le conseil de révision en 1911. Bon pour le service, il est affecté au 69ème Régiment d’Infanterie à Nancy (Meurthe-et-Moselle) le 9 octobre 1911.

Libéré de ses obligations militaires le 8 novembre 1913, il habite alors à Pierrelaye (Val-d’Oise) en avril 1914.
Mobilisé le 1er août 1914, il arrive au 128ème Régiment d’Infanterie le 3.
Le 128ème a déjà perdu une partie de ses effectifs à Virton en Belgique et Fontenois dans les Ardennes, quand Louis et son régiment arrivent dans la Marne pour y combattre l’ennemi.
Il décède des suites de ses blessures le 13 septembre à Maurupt-le-Montois, date indiquée sur sa fiche matricule.
Louis aurait eu 24 ans le 24 novembre 1914.
Sa dernière adresse est à Cramont son village de naissance.
Des trois fils GOSSELIN seul François a survécu, blessé deux fois, il restera pour toujours une victime de cette guerre.
Les noms des deux frères, Louis et Gédéon, sont inscrits sur le Monument aux Morts et sur une plaque commémorative de l’église Saint-Martin à Cramont.

Danièle REMY – Lionel JOLY
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