ILS AVAIENT 20 ANS EN 1914 – Robert DELACOURT et Paul DELIQUE d’Abbeville

Né le 13 juin 1893, Robert DELACOURT est le fils de Maxime DELACOURT et de Jeanne BACHELLIER.

Les familles DELACOURT et BACHELLIER font partie de la petite bourgeoisie abbevilloise, celle qui prospère, à la fin du XIXe siècle, grâce aux échanges commerciaux.

Maxime DELACOURT a repris l’activité de négociant en liquides de son beau-père, Charles BACHELLIER.

Maxime et Jeanne DELACOURT résident Rue Jeanne d’Arc à Abbeville, au cœur du centre-ville, près des rues commerçantes de l’Hôtel de ville et des Lingers. Leur premier enfant est une fille prénommée Madeleine, née cinq ans avant Robert. Une fille et un garçon, telle sera la fratrie DELACOURT.

Né le 29 juillet 1885, Paul DELIQUE est le fils d’Eugène DELIQUE et d’Amélia FRISTOT.

Eugène DELIQUE n’est pas du même milieu social que Maxime DELACOURT. Eugène DELIQUE est né à Fauquembergues, dans l’arrondissement de Saint-Omer dans le Pas-de-Calais. L’activité dans ce village d’un peu moins de 1 000 habitants est essentiellement agricole. Le père d’Eugène est charron Rue de Monsigny à Fauquembergues. Eugène DELIQUE aime ce milieu agricole. Bon élève, il souhaite devenir vétérinaire. Il y parvient et c’est à Abbeville qu’il trouve un premier emploi. Le régiment de Chasseurs à Cheval caserné au Quartier Dupré, Rue Saint-Gilles a besoin des compétences d’un vétérinaire. Les nombreux chevaux doivent être en bonne santé.

Eugène ne quittera plus la capitale du Ponthieu. Le coup de foudre est au rendez-vous. Il tombe amoureux d’Amélia FRISTOT, la fille d’un cafetier de la Rue Saint-Gilles, près de la caserne. En novembre 1882, les jeunes gens se marient. Eugène a 22 ans et Amélia à peine 19. Eugène et Amélia s’installent Rue Ledien, au Nord-Ouest du centre-ville. Deux années plus tard naît leur premier enfant prénommé Paul.

Quelques années plus tard, le hasard des déménagements rapproche les deux familles. L’entreprise de négoce de spiritueux de Maxime DELACOURT prend de l’ampleur. Il déménage alors avec son épouse et ses deux enfants pour des locaux plus vastes de la Chaussée Marcadé.

Dans le même temps, Eugène et Amélia DELIQUE s’installent avec leur fils Paul dans la même Chaussée Marcadé, à quelques centaines de mètres de leur précédent logement. C’est ici que la mort emporte bien trop tôt Amélia. La belle-mère d’Eugène, Armance FRISTOT, emménage alors avec Eugène et son fils, Paul.

Les familles DELACOURT et DELIQUE se connaissent bien. Le jeune Paul DELIQUE n’est pas insensible au charme de Madeleine DELACOURT. Paul et Madeleine se retrouvent de plus en plus souvent.

Paul exerce le métier de serrurier. Ce n’est pas cette activité qui le motive le plus dans la vie. Paul DELIQUE aime le football. Ce sport est pratiqué depuis quelques années seulement en France. Avec quelques copains de son âge, Paul décide de créer un club à Abbeville. Ils l’appelleront le  FBA (Foot-Ball Abbevillois). Paul a 15 ans. L’année suivante, ils lui préfèrent le nom de Sporting Club Abbeville. A 17 ans, Paul DELIQUE en devient le vice-président.

Robert DELACOURT, le frère cadet de Madeleine, rejoint le club dès son plus jeune âge.

En octobre 1905, Paul DELIQUE débute son service militaire au 3e Régiment de Chasseurs d’Abbeville. Alors qu’il s’était engagé pour trois années, il ne reste finalement que 12 mois dans la caserne Dupré. Sa passion pour le football occupe la plupart de son temps. Enfin presque. Le football et Madeleine sont les deux amours de sa vie.

Le 18 novembre 1907, Paul DELIQUE épouse Madeleine DELACOURT. Puis Paul reprend la direction de l’entreprise de son beau-père, comme ce dernier l’avait fait précédemment avec Charles BACHELLIER, son beau-père. Paul DELIQUE quitte son emploi de serrurier et devient négociant en vins et spiritueux.

Les jeunes mariés s’installent dans la maison DELACOURT Chaussée Marcadé alors que les parents de Madeleine déménagent Grande Rue Saint-Jacques. Le jeune Robert DELACOURT poursuit ses études supérieures à Amiens tout en continuant à pratiquer, dès qu’il le peut, le football dans le club de Paul DELIQUE, son beau-frère.

Paul et Madeleine DELIQUE ont deux filles, Rachel née en 1909 et Arlette en 1911.

Ayant obtenu une notoriété certaine dans toute l’agglomération d’Abbeville grâce au football, Paul DELIQUE est élu conseiller municipal en 1912. Le maire est Charles BIGNON.

1913 est une année importante pour les deux seuls jeunes hommes de la famille DELACOURT-DELIQUE. Paul devient président du Sporting Club Abbevillois et Robert débute son service militaire. Engagé volontaire pour 3 ans, Robert DELACOURT est affecté au 72e Régiment d’Infanterie. Il rejoint la caserne Friant d’Amiens. A chaque permission, grâce aux nombreux trains circulant entre Amiens et Abbeville, il lui sera facile de venir retrouver sa famille à Abbeville et… jouer au football.

Le 1er août 1914, quand l’ordre de mobilisation générale est affiché dans les rues d’Abbeville, Robert DELACOURT est dans sa caserne amiénoise. Il ne peut embrasser ses parents et sa soeur une dernière fois. Le 5 août, le 72e RI quitte Amiens par le train pour rejoindre le département de la Meuse. Avant le départ, Robert peut retrouver Paul DELIQUE, son beau-frère, pour quelques heures. Mobilisé pour rejoindre le 272e Régiment d’Infanterie, c’est à la caserne Friant qu’arrive Paul le 3 août.

Les hommes du 272e RI quittent Amiens le 9 août pour Stenay, dans la Meuse. Le 272e RI ne participe pas aux premiers combats le long de la frontière belge le 22 août 1914. Comme le 72e RI et les autres régiments de la Région militaire d’Amiens, c’est dans la Marne, début septembre, que ses hommes vont devoir livrer de terribles combats pour empêcher les Allemands de poursuivre leur invasion en direction de Paris. L’ordre venu de l’état-major français est sans équivoque : « résister jusqu’à la mort »…

Le 72e RI est positionné sur les territoires de Pargny-sur-Saulx et Maurupt-le-Montois. Le 272e RI est plus en arrière, au sud de Vitry-le-François, dans le secteur des Rivières-Henruel et Petites-Perthes. Une quinzaine de kilomètres sépare Robert DELACOURT de Paul DELIQUE.

Les copains sont tombés par centaines. Quand prend fin la Bataille de la Marne, le 10 septembre 1914, Robert et Paul sont vivants.

Le combat se poursuit au Nord-Est de la Marne. Après une retraite de quelques kilomètres, les Allemands se positionnent dans des terrains qu’ils jugent favorables. La guerre des tranchées va débuter. Pour les hommes de la Région d’Amiens, l’enfer débute en forêt d’Argonne dès la mi-septembre.

Robert DELACOURT n’ira pas plus loin. Il est tué à l’ennemi au combat de Servon le 15 septembre 1914.

Robert DELACOURT (photo : laurent59.canalblog.com)

 Le 8 octobre 1914, dans le même secteur, Paul DELIQUE est blessé. Evacué vers l’arrière, Paul est éloigné des champs de bataille pendant plusieurs mois. Guéri de sa blessure mais victime d’accès d’asthme, il est ensuite classé au service auxiliaire avant de rejoindre le dépôt des chevaux du 19e Régiment de Chasseurs à Crécy-en-Ponthieu puis d’être affecté en Escadron territorial de Dragons.

Paul DELIQUE est démobilisé le 9 avril 1919. Il retrouve Madeleine et ses deux filles.

La guerre a laissé de profondes cicatrices dans la famille. Madeleine a perdu son unique frère. et Maxime et Jeanne DELACOURT ont perdu leur seul fils.

La famille DELIQUE poursuit sa vie Rue du Maréchal Pétain, dans le quartier de la Chaussée Marcadé. Paul y poursuit son activité de négociant tout en assurant sa mission d’élu dans la commune.

Paul DELIQUE (photo: AD Somme Fonds Max Lejeune)

Il est élu adjoint au maire en 1923 puis maire d’Abbeville de 1925 à 1942.

Paul DELIQUE est mort le 28 août 1951 à Abbeville, à l’âge de 65 ans.

Monument en hommage aux footballeurs abbevillois victimes de la guerre (photo : richesses-en-somme.com)

Son unique beau-frère, mort en Argonne en septembre 1914, a 21 ans pour toujours. Le nom de Robert DELACOURT est inscrit sur le monument inauguré en 1923 sur la Place de l’Amiral Courbet à Abbeville. Il est également gravé sur le monument érigé au sein de l’enceinte sportive du Sporting Club Abbevillois. Un stade inauguré le 24 septembre 1922, en même temps que son monument dédié aux footballeurs abbevillois victimes de la Grande Guerre. Un stade qui porte encore aujourd’hui le nom de Paul DELIQUE.

Lionel JOLY et Xavier BECQUET

Remarque : dans certains documents d’archives du XIXe siècle (notamment dans le Pas-de-Calais), le patronyme DELIQUE pouvait être orthographié DELICQUE.

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