Les deux frères de Gézaincourt

Fernand BROUSSEL est né le 17 mars 1894 à Abbeville dans le faubourg Saint Gilles,

Son père Oscar (ou Hoscar) est originaire de Nampont-Saint- Firmin (Pas de Calais) où il est né en 1858 et sa mère Julie SELLIER, de Mareuil-Caubert (Somme) en 1871.

Oscar BROUSSEL, avait épousé le 21 juin 1890, Juliette SELLIER, une jeune fille de Mareuil-Caubert, née en 1868. Oscar était alors agriculteur et le couple habitait Abbeville rue de Plantis ; Juliette décède le 11 mai 1891, moins d’un an après leur mariage.

Oscar, devenu veuf, se rapproche de sa belle-sœur Julie SELLIER, née en 1871.

En 1894, à Abbeville, naît leur premier enfant, Fernand, puis le 23 août 1895 Lucien, et Suzanne en 1896. L’année suivante, toujours à Abbeville, les parents régularisent la situation : ils se marient le 22 mai 1897 et vont s’installer à Gézaincourt, Hoscar devient voiturier et Julie ménagère.

Le 29 juillet 1898 à Gézaincourt, naît Simonne, qui décèdera le 24 septembre et le 9 avril 1900, Madeleine. Une troisième fille, prénommée Simonne verra le jour à Beauval en 1906 et Alfred complétera la fratrie à Gézaincourt en 1909.

Julie, la mère, décède le 17 août 1910 à Gézaincourt à l’âge de 38 ans laissant Oscar élever seul toute sa petite famille.

Gézaincourt est un village de plus de 650 habitants et situé à l’Ouest de la route d’Amiens à Doullens, ville dont il est limitrophe. La Gézaincourtoise est une petite rivière qui rejoint l’Authie en aval de Doullens.

Au début du XXème siècle, c’est une localité essentiellement agricole, mais la proximité des bourgs de Beauval au Sud avec l’usine de textile Saint-Frères et Doullens au Nord avec la retorderie de coton Sydenham (filature de Rouvral), permet à de nombreux villageois d’y travailler.

Les 2/3 des habitants résident dans le bourg principal, le dernier tiers est réparti entre Bagneux, un lieu-dit tout proche, et le hameau de Brutel avec une centaine d’âmes, à près de 2 kms au Nord.

La famille AUBRY, cantonnier et garde barrière, habite la gare située au Sud du territoire sur la ligne de chemin de fer reliant Doullens à Candas et faisant partie de la ligne Frévent/ Amiens-Saint-Roch des Chemins de fer du Nord.

En 1911, habitant la rue Neuve à Gézaincourt, Oscar est manouvrier dans le village. Fernand, ouvrier d’usine, travaille chez SAINT à Beauval, comme beaucoup de Gézaincourtois, ils font le trajet ensemble entre le domicile et l’usine, à travers la campagne où ils rencontrent les paysans au bord du chemin, toujours un moment de partage pour la population.

Lucien est ouvrier agricole au village, tantôt avec Monsieur LECLERCQ le meunier, la famille SERRE, les bûcherons, Monsieur DUSEVEL …, ses 3 sœurs et son petit frère sont à la maison. Ils suivent attentivement les cours de Monsieur TABART, l’instituteur qui a succédé à Monsieur LANCÉA.

Fernand, devenu ouvrier agricole, se présente au Conseil de Révision début 1914 à Doullens.

Déclaré bon pour le service, il est incorporé au 128ème Régiment d’Infanterie dès le 26 août 1914 et arrive au corps le 28. Après quelques semaines d’instruction, il rejoint le régiment qui occupe alors le Bois de la Gruerie (Marne) dans les forêts d’Argonne, les pertes sont déjà importantes : entre mi-septembre 1914 et mi-février 1915, le régiment a perdu la moitié de ses effectifs : 24 officiers et plus de 1600 hommes sont hors de combat ! les renforts sont bien utiles. 

Le 128ème est alors déplacé sur le front de Champagne, vers Beauséjour, en février. Le 9 mars 1915, il y est blessé par éclats d’obus : Fracture communicative de la jambe droite, avec plaie gangrène gazeuse entraînant une amputation. Fernand est transféré sur l’hôpital temporaire n°74 à Royat, au Sud-Ouest de Clermont-Ferrand (Puy de Dôme).

Il décèdera le 15 mars 1915, il y a 110 ans jour pour jour ! la veille de ses 21 ans !!!

Fernand recevra la croix de guerre avec étoile d’argent ainsi qu’une citation de la Division le 7 juillet 1919 à titre posthume : » Blessé grièvement au poste d’honneur confié à sa garde. Mort des suites de blessures le 15 mars 1915.  » 

Son frère Lucien, d’un an son cadet, né le 23 août 1895, est également ouvrier agricole au moment du Conseil de Révision de Doullens. Il est incorporé au 1erRégiment d’Infanterie le 18 décembre 1914, en garnison à Cambrai avant le début du conflit. Son instruction terminée, il est muté au 412ème Régiment d’Infanterie, le 10 mars 1915 (le lendemain de la blessure de son frère).

Ce nouveau régiment dont le 3ème bataillon est composé essentiellement de ‘’gens du Nord et de parisiens ‘’ issus du 1er Régiment d’Infanterie, est officiellement opérationnel le 18 avril sur la Montagne de Reims, quand il reçoit son drapeau du Général FRANCHET d’ESPERAY.

Fin août 1915, le 412ème est dirigé sur l’Aisne, au Nord de Berry-au-Bac. En octobre c’est dans le secteur de Craonne, puis en décembre à Beauséjour en Champagne.

En première ligne, il est attaqué de façon intense par des bombes de tous calibres et des gaz toxiques, occasionnant des pertes importantes. Les pluies d’hiver inondent les tranchées jusqu’à hauteur de ceinture, les conditions sont de plus en plus mauvaises.

 Lucien est muté le 25 avril 1916 au 78ème Régiment d’infanterie qui combat à Verdun puis dans l’Aisne dans le courant de l’été, avant de poursuivre dans la Somme à partir de novembre.

C’est au combat de Biaches, près de Péronne que Lucien sera tué le 28 novembre, il avait 21 ans comme son frère Fernand…

Il sera cité à l’ordre du régiment :’’Très bon soldat, courageux et dévoué, tué à son poste de combat’’ et recevra la médaille militaire.   

En 1921, la famille Broussel a déménagé dans une maison de la rue de l’Eglise, celle de la rue Neuve étant maintenant trop grande : les 2 garçons, Fernand et Lucien, ont été tués à la guerre ! seuls leurs noms figurent sur le Monument aux morts et sur une plaque commémorative dans l’église Saint-Martin de leur village : Gézaincourt.

Oscar, leur père est devenu courtier, Suzanne, Simonne et Alfred sont ouvriers agricoles. 

Danièle REMY et Lionel JOLY

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