ILS AVAIENT 20 ANS EN 1914 – le dernier curé de Doingt

Vincent JOUBAUD est né le 10 mai 1892 à Taupont, commune de plus de 2 000 habitants du Morbihan située au nord-ouest de Ploërmel. Il est issu d’une famille de cultivateurs installés au lieu-dit Le Haut-Bois, à quelques centaines de mètres au sud du chef-lieu de la commune.

Ses parents, Pierre-Marie JOUBAUD et Marie-Anne QUATREVILLE sont originaires de la commune. Après leur mariage, en janvier 1884, ils résident dans la ferme des parents de Pierre-Marie.

Leur premier enfant se prénomme Pierre-Marie, comme son père. Quand Vincent vient au monde en 1892, il est le 5e enfant de la fratrie. Il est précédé par Anne-Marie, Joseph et Marie-Julienne.

Les enfants de fermiers contribuent tout naturellement très tôt à la vie de l’exploitation. Toutefois, en période scolaire, les parents JOUBAUD tiennent à ce que leurs enfants soient assidus à l’école. Il faut dire que Pierre-Marie, leur père, est adjoint au maire. Il deviendra maire de Taupont quelques années plus tard.

Vincent est un bon élève. Après le certificat d’études, il se destine aux études religieuses. Il entre au séminaire Lebisey près d’Hérouville dans le Calvados. Il est interne et ne rentre à la maison que très rarement.

La loi sur le service militaire de 1905 impose à tous les jeunes hommes d’effectuer deux années de service militaire, y compris les étudiants ecclésiastiques. A vingt ans, Vincent est convoqué devant le Conseil de Révision de Ploërmel. Jugé apte, il est convoqué le 9 octobre 1913 au 65e Régiment d’Infanterie de Nantes. Cette unité est composée essentiellement de Bretons et de Vendéens.

Homme de rang de 2e classe, son statut de futur prêtre ne lui évite pas de subir le même régime que les autres copains appelés.

Quand la guerre est déclarée, le 3 août 1914, Vincent JOUBAUD est toujours sous les drapeaux. Il participe aux premiers combats de la Grande Guerre. Le 5 août, le 65e quitte Nantes pour l’Est de la France. Il arrive le 7 août à Grandpré, dans les Ardennes, puis Sedan où il franchit la Meuse. Le 22 août, les hommes du 65e RI reçoivent leur baptême du feu près de Maissin en Belgique.

La retraite de l’Armée française entraîne ensuite les troupes vers la Marne, dans le secteur de Fère-Champenoise. La Première Bataille de la Marne provoque d’importantes pertes. Vincent JOUBAUD voit tant de copains tomber à ses côtés.

Après de longues marches forcées, les rescapés du 65e RI arrivent à Compiègne fin septembre où un train les transporte jusqu’à Albert dans la Somme. L’ennemi a stoppé sa progression vers Paris. La guerre de tranchées début en octobre 1914. Les hommes du 65e Régiment d’Infanterie sont positionnés dans le secteur de Contalmaison, Fricourt, Beaumont-Hamel et La Boisselle, au nord d’Albert. En décembre et janvier les combats sont très éprouvants. Pour reprendre quelques mètres à l’ennemi tant de pertes sont à déplorer ! Les plus violents combats se déroulent dans l’eau, la boue, les tranchées qui s’effondrent parmi les tombes et les croix du cimetière communal de La Boisselle.

Pendant les premiers mois de 1915, le régiment tient le secteur de la ferme de Touvent près d’Hébuterne. C’est dans le Pas-de-Calais que Vincent JOUBAUD est blessé pour la première fois. Une balle lui a touché l’épaule droite. Evacué vers le Pavillon Duvauchelle à Amiens pour y être soigné, quand Vincent revient au front le 24 mai 1915, ses copains du 65e RI sont maintenant dans le secteur de Mesnil-les-Hurlus. La Bataille de Champagne voulue par le général Joffre y sera particulièrement meurtrière pour un résultat quasi nul. Le 25 septembre, Vincent JOUBAUD est capturé par les Allemands.

Il est transféré outre-Rhin dans le camp de Giessen puis dans celui de Munchenberg.

Vincent n’est rapatrié en France que le 1er décembre 1918. Sur le sol français, les combats ont cessé. Après trente jours de permission, Vincent JOUBAUD retrouve son régiment, puis est transféré au 116e Régiment d’Infanterie. Il est démobilisé le 22 août 1919.

Une autre vie débute alors pour lui. Une vie de paix. Vincent JOUBAUD quitte la France pour rejoindre la ville de Gijzegem près d’Alost en Belgique. Vincent y rejoint le séminaire des Eudistes, congrégation créée au XVIIe siècle près de Caen. Vincent y exerce la mission de chapelain. Il est ordonné prêtre le 10 juin 1922 et rejoint ensuite la basilique de Domrémy dans la Meuse.

Il exerce ensuite son sacerdoce à Versailles au début des années 1930 puis à Donville-les-Bains près de Saint-Lo dans la Manche.

En juillet 1938, il arrive dans la Somme, à Doingt-Flamicourt. C’est dans cette commune qu’il célèbre ses 25 ans de sacerdoce, en juin 1947.

L’abbé Vincent JOUBAUD entouré de paroissiennes de Doingt-Flamicourt

Vincent JOUBAUD aimait écrire. De nombreux articles écrits par sa main ont été lus par plusieurs générations d’habitants du village. Vincent JOUBAUD est resté à Doingt-Flamicourt jusqu’en 1971. Il ne sera jamais remplacé et reste pour toujours le dernier prêtre de la paroisse. Il aimait raconter qu’il avait vu de ses propres yeux, le 15 janvier 1915, la Vierge dorée de la basilique d’Albert se coucher, au sommet du clocher, suite à des tirs d’artillerie. La légende disait que lorsqu’elle tomberait, la guerre s’arrêterait. Ce fut le cas peu de temps avant le 11 novembre 1918.

La rue qui va de l’église de Doingt au cimetière communal porte aujourd’hui le nom de Vincent JOUBAUD.

Au premier plan, Vincent JOUBAUD en 1971 (à gauche,René DESABES et Théo MARCHANDISE)

Didier BOURRY et Xavier BECQUET

Pour plus d’informations sur l’abbé Vincent JOUBAUD, nous vous recommandons le livre « Doingt-Flamicourt, sur les traces de son passé » de l’association Mémoire de Doingt-Flamicourt

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